Les grands ensembles urbains, réalisés depuis l'indépendance à travers tout le territoire national, ont été érigés sous la pression de l'urgence. Ils se sont caractérisés par une répétitivité des bâtiments. Les décideurs de l'époque pensaient que c'était le seul palliatif pour combler l'énorme déficit enregistré dans le secteur de l'habitat. Il fallait répondre à un besoin afin d'éviter une pression…sociale. Sachant toujours que la demande en logements est considérable même dans les années 1950 et 1960, le déficit du logement a toujours été de l'ordre de un million d'unités. Le secteur, pour lequel on a créé tout un ministère en février 1977, n'a pas résorbé la crise. La tutelle a hérité d'un passif très lourd, avec un taux d'occupation par logement (TOL) de 9, dépassant ainsi les normes requises. à cette époque, le secteur de la construction était mal structuré, des chantiers marqués par des retards et arrêts fréquents, une main-d'œuvre presque inexistante ainsi que l'épineux problème des réserves foncières. Les moyens de réalisation demeurent insuffisants, notamment le manque d'encadrement au sein des entreprises. Celles-ci souffrent encore d'une mauvaise organisation. C'est-là, le constat établi par le collège national des experts-architectes (CNEA) présidé par M. Abdelhamid Boudaoud. Pour faire face à cette délicate situation, le ministère de l'habitat a dû procéder à la restructuration du parc immobilier vétuste et notamment se soucier du type de logement et du système de financement à adopter. Sa préoccupation primordiale était également la formation. Devant l'ampleur du déficit des logements à combler, la quantité a prévalu sur la qualité avec toutes les conséquences que cela a engendrées. Les décisions prises dans le secteur ont de tout temps été d'ordre beaucoup plus administratif que technique. En dépit de la construction d'un nombre important de logements, estimé à 4 millions unités, la crise n'a pu être atténuée. L'architecte, soulignera le CNEA, a toujours évolué dans un environnement contraignant. Le CNEA résume ainsi le rôle de l'architecte dans les projets de logement : “Existe-t-il une compétence de l'art du logement dans notre pays ?” Les différents systèmes de construction, tels que VARECO, table et banche, poteaux poutres… avec lesquels sont concrétisés les programmes de logements, ont été introduits sans la consultation de l'architecte. Selon le président du CNEA, l'absence des résultats est dû essentiellement au manque de dialogue entre les différents intervenants, tels que le maître de l'ouvrage, le maître de l'œuvre, l'entreprise, les élus et surtout le maître d'usage qui est le concerné. “C'est l'architecte qui interpelle le politique et non le contraire”, précisera-t-il. L'idée de la construction d'un logement doit avoir, estime M. Boudaoud, une vision urbaine, culturelle, économique et commerciale. Le CNEA propose, toutefois, quelques pistes de réflexion pour une sortie de crise. Il recommande, d'une part, la suppression des barrières administratives et la création d'une vraie politique du financement du logement, d'autre part en ouvrant le secteur au privé et en encourageant la piste du partenariat. Le collège indique la nécessité d'arrêter une nouvelle politique de l'habitat qui ne doit pas se soucier uniquement du nombre de logements à réaliser, mais qui sera, au contraire, dotée d'une vision d'avenir. Badreddine K.