Liberté : Les vaccins acquis par l'Algérie auprès du centre de recherche russe Gamaleïa et du groupe britannique AstraZeneca sont-ils efficaces contre les variants britannique ou sud-africain du Covid-19 ? Pr Kamel Djenouhat : Ce qu'il faut savoir en matière de vaccins anti-Sars-CoV-2, même si les laboratoires pharmaceutiques ont utilisé des technologies différentes, c'est que la finalité de leurs produits est la même. C'est-à-dire stimuler ou provoquer une réponse immunitaire contre la protéine S. C'est la protéine utilisée par le virus pour infecter les cellules et provoquer la maladie. Par conséquent, le produit final est le même. Donc s'il y avait inefficacité d'un vaccin contre des nouveaux variants, on assisterait à une inefficacité similaire de tous les vaccins. Néanmoins, les données préliminaires disponibles quant à l'efficacité des vaccins contre les nouveaux variants, particulièrement contre le variant britannique, sont rassurantes, même si on assiste à une très légère baisse de l'efficacité qui n'impacte pas l'efficacité globale des vaccins. Pour ce qui est des variants sud-africain et amazonien ou brésilien, il y a peu de données disponibles avec, parfois, des résultats contradictoires. Je pense qu'on aura plus de données et de précisions dans les jours à venir. Quelle est la particularité du variant britannique ou sud-africain par rapport aux autres mutations qu'a connues le coronavirus ? Avant de répondre, j'aimerais bien rappeler que les mutations des virus représentent un processus normal qui entre dans son cycle de vie. D'ailleurs, dans une déclaration faite à votre journal durant l'été dernier, nous avons parlé du virus prédominant qui présente la mutation D614G, exprimant à sa surface une molécule spike qui rend la souche plus contagieuse. Cette mutation est absente de la souche originale chinoise. Pour ce qui est du variant britannique, paru en septembre et qui n'a été diagnostiqué qu'en décembre, il présente quelques caractéristiques spécifiques, qui ont été d'ailleurs rapportées sur le site de l'Office national des statistiques britanniques pouvant être modifiées : sur le plan génomique, c'est un variant présentant une dizaine de mutations dont la moitié touche le gène codant pour la protéine S. Epidémiologiquement parlant, il s'agit d'un variant qui se distingue par une grande vitesse de contagiosité, supérieure de 56% par rapport aux précédents, et lorsqu'il rentre dans une famille, c'est la quasi-totalité des membres qui sont atteints. S'agissant des signes cliniques, il faut savoir que la perte du goût et de l'odorat sont moins fréquents, alors que les autres symptômes dominants sont la toux, la fièvre, les maux de tête et les douleurs musculaires. La chose spécifique de ce variant est due au fait que les formes asymptomatiques sont rares. Il touche beaucoup plus les formes jeunes, même les enfants ne sont pas épargnés. Existe-t-il des moyens de diagnostic spécifiques pour identifier ces variants ? Pour ce qui est des moyens diagnostiques biologiques, il n'y avait que la PCR qui permettait de suspecter ce variant (présence de gènes du Sars-CoV-2 à l'exception du gène S) avant la confirmation par séquençage. J'insiste sur le fait que diagnostiquer ce variant ne change rien à la prise en charge thérapeutique et les mesures préventives restent les mêmes. Pour les tests antigéniques, je pense qu'ils ne seront pas efficaces pour le dépistage de ces variants du fait que la plupart des techniques sont basées sur la recherche de la protéine NP et non de la protéine S. Le maintien de la fermeture des frontières préconisé par le Comité scientifique malgré l'amélioration la situation épidémiologique demeure-t-il une solution sage pour se protéger de ces variants ? Je comprends bien la sage décision du Comité scientifique qui vise à prévenir l'entrée du nouveau variant dans une conjoncture où nous assistons à une décrue de la pandémie chez nous par rapport à ce qu'on observe dans le reste du monde. Néanmoins, si la situation l'oblige, on peut copier le système islandais ou le système anglais. Pour le système islandais, il se base sur l'exigence d'une PCR négative datant de moins de 3 jours suivie d'un confinement de 5 jours et de refaire la PCR ou le test antigénique. S'il s'avère négatif le citoyen est déconfiné. On a parlé à maintes reprises de cette procédure efficace pour prévenir l'entrée des nouveaux variants. D'ailleurs, plusieurs pays ont adopté ce modèle et ont commencé à l'appliquer. Néanmoins, on sait très bien que cette procédure a un coût.