C'est lundi soir que le coup d'envoi de “Layali ramadan 2005” a été donné par l‘Etablissement arts et culture à la salle Ibn-Khaldoun. Au programme, le vernissage d'une exposition collective picturale regroupant un panel varié d'artistes algériens (impressionnistes, miniaturistes, calligraphes, cubistes…) Une à trois œuvres par artiste-peintre seulement, et pour cause, le hall de la salle Ibn Khaldoun ne peut en contenir davantage. Dès l'entrée, les deux premiers tableaux sont l'œuvre de Omar Zermane : Sauvez-la ! et Si cela m'était conté, représentent un savant alliage de calligraphie arabe et de motifs berbères. Selon l'auteur, ces deux graphismes imbriqués ainsi expriment un “problème d'identité”. À dominante bleue, puis rouge, le contraste du choix des couleurs - froide, chaude - accentue davantage la différence des deux motifs choisis. Dans un genre différent, Aïcha Hadj Sadok surfe entre le cubiste et le semi-figuratif. Ses œuvres - des natures mortes - font appel à un dosage savant et mesuré de couleurs chaudes tranchant avec un contour blanc ; blancheur dont le rôle refroidissant contraste avec le rouge des fruits et le bleu de la table. La coupe de fruits est en à-plat, sans perspective ainsi que le dallage du sol, signe caractéristique du cubisme. Les deux tableaux présentés sont des gouaches et la technique est celle du couteau. Mounia Halimi Fernani, quant à elle, présente Bérénice qui, comme son nom l'indique, évoque les fonds marins. Sa technique diffère de celle des autres réalisations par les procédés utilisés : papier glacé et encre de Chine diluée à l‘eau (technique dite “tachisme”). Ces “taches” aux couleurs tendres et pastel, bleu-ciel, rose, jaune-pâle et vert tendre, ont des reliefs nuageux et laissent imaginer une faune marine où l'œil du poisson est accentué d'un trait noir. Khaled Kouadri n'est plus à présenter. Ses peintures étalent le patrimoine architectural ancien, La Casbah aux ruelles étroites et aux balcons en bois ciselé, la citadelle (le Palais des raïs), l'Amirauté… Prédominance de bleu sombre sur une ruelle, sous un clair de lune, où le bleu ciel alterne agréablement en illuminant un pan de mur… Cri du cœur de l'artiste auprès des instances concernées : “Quand la villa Abdeltif sera-t-elle enfin rouverte aux artistes peintres ?” Mona Zaddem est une artiste peintre tunisienne résidant en Algérie ; elle a déjà exposé ses œuvres à plusieurs occasions. Elle qualifie ses représentations de semi-figuratives : femme de profil (rêveuse), femme de dos (charmeuse), femme au visage tronqué (exil). Ses toiles exhalent une féminité sensuelle et lascive. La Rêveuse est un revers de médaille. Regard fixé au lointain, elle attend. L'Exil révèle l'intrigue : il n'y a pas de regard. Cependant l'équilibre plastique est indéniable entre la masse, les volumes et les couleurs, jaune et bleu dominants. La Charmeuse s'inspire de certains aspects vestimentaires de l'Antiquité égyptienne ou des civilisations précolombiennes. Le personnage féminin est dans une attitude indolente, de dos, où l'arc de la hanche ondule légèrement dévoilé par le foulard bleu foncé qui recouvre le dos. Les couleurs chaudes, terre de Sienne, jaune et ocre, sont cassées par le bleu encre, et l'observation laisse la place à l'interprétation. Mouna Zeddam a un réel talent dans la peinture figurative et ses œuvres sont excellentes. Les œuvres suivantes sont commises par Imène Mebarki. Images surréalistes de lianes multicolores, imbriquées, touffues telles une forêt vierge où apparaissent des pierres précieuses et des visages hilares (blancs et noirs). Explosion de couleurs, feu d'artifice, images oniriques au milieu desquelles l'ombre d'une femme perdue dans ce labyrinthe cherche son chemin... Khadidja Slimani trône auprès de son œuvre : un coucher de soleil derrière une mer étale — à droite une falaise sombre — Mme Slimani est autodidacte — agronome de formation, elle prouve cependant un indéniable talent dans la reproduction de tableaux impressionnistes (Monet). La calligraphie n'est pas en reste puisqu'elle est représentée par deux artistes : Ali Mechta et Radia Zouaoui. Lorsque la calligraphie représente des personnages elle devient miniature, lorsqu'elle entrelace des fleurs ou des lignes géométrique, elle se veut enluminure — Liberté est l'œuvre de Ali Mechta ; oiseau aux ailes déployées, prédominance d'or et bleu ciel et de blanc. Dans un tout autre registre, le bronze et la peinture sur bois sont présents par le biais de Mahieddine Cherrad avec son “bouclier” et Mounir Bennikous qui expose deux coffrets algérois en bois peint. L'un à fond noir et aux graphismes miel, le second au fond mandarine, et aux entrelacements en jaune. M. Bennikous réalise des étagères à l'ancienne, des salons style mauresque, des meïdas... Enfin, Malika Garni, halte finale. Natures mortes exposant pots de terre kabyles, amphores, tadjine où brillent au centre des fruits carmin — le second tableau campe un Narguilé posant majestueusement devant un drap blanc. Abla Retteb est une élève des Beaux-Arts. Céramiste moderne, elle expose deux tableaux classiques : femmes voilées, architecture arabe du Sud, palmier... La promenade picturale prend fin. Instants intenses ; nous laissons le groupe de femmes terminer son périple, le nôtre est déjà fini... Nora Sari