L'orchestre est dirigé par Moussa Haroun ; le programme a été élaboré sur 2 noubas : la nouba Raml et la nouba Raml El Maya. Deux solistes de talent ont marqué ce concert ; Lamia Maâdini, qui n'est plus à présenter, est aujourd'hui une vedette. En revanche, la surprise vint du percussionniste Soufiane Babaci. L'assemblée fut séduite dès les premières notes par le timbre de sa voix, se situant en basse, quelques inflexions de sa voix le situeraient entre feu Abdelkrim Dali et feu El-Hadj El-Mahfoudh. La voix est là, mélodieuse, grave, limpide. De l'or. Du miel. Le public, silencieux, est sous le charme de son refrain, Nechrab ou n'ghenni ou na'chaq (je bois, je chante et je suis amoureux). À la fin du concert, il interprétera encore un m'dih dini, El Horm ya habib Allah qui clôturera le spectacle. Quant à l'orchestre et aux impressions relevées dans le public, l'aspect vestimentaire mériterait une remarque. Pourquoi donc djellabas blanches marocaines et babouches ? Lorsque le vêtement porte le sceau de l'appartenance au pays, à la région, ou à la ville, il exprime une identité propre, revendiquée et affichée. Si ce même vêtement est étranger, il devient alors un déguisement. Essendoussia appartient à l'école Sanaâ d'Alger, et s'habille maghribi. Que voilà un anachronisme de mauvais aloi ! Et le tarbouche ! Ah ! le tarbouche ! Si la “chéchia stamboul” est le couvre-chef algérois choisi, l'art de le porter est tout un poème : enfoncée droite au milieu du crâne, au ras des oreilles, elle trahit une appartenance populaire ; élégamment inclinée sur le côté, mordant légèrement le front, le port est citadin et distingué. Lors d'une fête, si la musique se prête à la danse, alors, un coup de pouce à l'arrière la bascule sur le front, droite au ras des sourcils, et là, elle se veut coquine ou polissonne (m'anngra) ; par contre, reculée à l'extrême, couvrant, prête à tomber, l'arrière du crâne, elle devient dubitative… Messieurs, accordez donc vos chéchias ! Mais, n'est-ce pas, qu'importe le vêtement, pourvu qu'on ait l'ivresse ! Ce soir-là, si Hassen Tahir* avait été là, dodelinant de la tête, il aurait ponctué la prestation de Lamia et de Soufiane par un “Lah Allah !” tonitruant. *Le défunt Hassan Tahir fut parmi les membres fondateurs d'Essendoussia Nora Z.