À considérer la séquentialité des détentions, la proximité qui devait sans doute lier les responsables en question, il n'est pas exclu que d'autres têtes tombent. Son nom n'est sorti de l'ombre qu'à la faveur d'un séjour entouré d'une grande discrétion en terre helvétique en avril 2020. Alors que le pays, confronté à l'arrivée de la pandémie de Covid, venait de se confiner et de fermer ses frontières, lui s'est envolé en Suisse pour être admis en cardiologie au prestigieux hôpital universitaire de Genève pour y subir une opération chirurgicale. L'affaire pouvait passer inaperçue n'eut été la tournure prise par les événements dont la presse étrangère s'était saisie immédiatement : refus de l'hôpital de lui accorder une prolongation de séjour pour convalescence. Mais parce que le patient n'est pas un personnage ordinaire. Il faisait partie de la haute hiérarchie militaire algérienne. Son nom ? Abdelhamid Ghriss, celui-là même qui vient d'être placé en détention à la prison militaire de Blida. L'information n'a pas été annoncée officiellement, mais selon nos confrères d'El Watan, l'ex-secrétaire général du ministère de la Défense est poursuivi pour entre autres chefs d'inculpation "enrichissement illicite", "abus de fonction" et "détournement de deniers publics". Des faits dont il se serait rendu coupable du temps où il officiait à la tête du département de l'organisation et de la logistique et à la tête du secrétariat général du MDN, d'après la même source. Des postes stratégiques qui faisaient de lui un des maillons parmi les plus importants de l'establishment constitué autour du puissant général de corps d'armée d'alors, le défunt Ahmed Gaïd Salah. "Toutes les liaisons entre le Président et l'armée passent par lui. C'est lui qui décide des mouvements de troupes", soutenait, au printemps 2020, un observateur dont le nom n'a pas été spécifié au magazine français Le Point. Mais comme les autres officiers supérieurs tombés en disgrâce à la faveur des bouleversements politiques qu'a connus le pays depuis mars 2019, très peu de choses filtrent sur le profil du natif de Batna. On sait seulement que sa chute était prévisible dès son remplacement en mars dernier et dès lors qu'il faisait l'objet d'une interdiction de quitter le territoire. Sa chute va-t-elle entraîner d'autres têtes lorsque l'on sait l'importance du poste qu'il a occupé durant presque trois ans ? Difficile de parier un kopeck au regard de l'opacité qui a toujours caractérisé le landerneau politique algérien. Mais elle intervient dans la foulée d'une "purge" qui a ciblé de puissants responsables militaires réputés proches du défunt chef d'état-major.C'est le cas de l'ex-directeur général de la sécurité intérieure (DGSI), le redoutable Wassini Bouazza, condamné en septembre 2020 par la Cour d'appel militaire de Blida à huit ans de prison ferme assortie d'une amende de 500 000 DA et récemment dégradé. Il y a aussi l'ancien adjudant-chef de l'ANP, secrétaire particulier d'Ahmed Gaïd Salah, livré à l'Algérie en août 2020 par la Turquie où il s'était réfugié quelques mois plus tôt avec dans sa hotte des documents confidentiels. Même sort pour l'ex-patron de la DCSA et l'ex-général-major Abdelkader Lechkhem, directeur central des transmissions ou encore le général Lakroum. En tout et pour tout, une trentaine d'officiers supérieurs seraient derrière les barreaux pour des chefs d'inculpation essentiellement liés à des faits de corruption, selon El Watan. À considérer la séquentialité des détentions, la proximité qui devait sans doute lier les responsables en question, il n'est pas exclu que d'autres têtes tomberont d'autant que pour certains, à l'image de Wassini Bouazza, d'autres affaires le concernant sont toujours en instruction, comme l'avait annoncé un communiqué de la Cour militaire de Blida en septembre 2000.