Ce serait un "miracle" si l'Etat pouvait "financer les réformes" dont a besoin notre économie avec des "ressources internes". Dans l'économie actuelle, il n'y a pas de honte à ce qu'un pays "s'endette sur les marchés extérieurs pour relancer et développer son économie". C'est ce qu'a souligné, en substance, Abdelrahmi Bessaha, docteur en économie, au cours de la conférence nationale économique et sociale organisée hier par le FFS, à son siège, à Alger. Abdelrahmi Bessaha, l'expert du FMI, qui dit s'exprimer en tant que citoyen algérien, estime que "les réformes seront douloureuses, mais nécessaires, pour bâtir une économie forte et productive". "Elles pourraient, dit-il, se faire, avec la mise en place d'un filet social étendu et bien géré, le tout inscrit dans une vision à moyen terme". L'expert a tracé quelques pistes de réformes, préconisant ainsi "une rationalisation de la masse salariale dans la Fonction publique estimée aujourd'hui à 2 400 milliards de dinars, une diminution graduelle des subventions à l'énergie, à l'eau et au logement (...)". Sur la question du taux de change, M. Bessaha a mis en exergue le fait qu'il ne faut pas le déprécier, mais plutôt le faire glisser progressivement. Il a, en outre, estimé qu'il y a urgence de définir une stratégie pour l'avenir, engager les réformes, faisant observer, cependant, qu'il ne sert à rien de faire des réformes partielles. Abondant dans le même sens, Mustapha Mekidèche, économiste et spécialiste des questions énergétiques, a affirmé que la crise que vit le pays devrait être un moment favorable pour engager des réformes, et non l'inverse, et que l'embellie, même relative, des marchés pétroliers aujourd'hui ne doit pas nous faire oublier les réformes et les défis qui restent à relever. Il s'est, par ailleurs, interrogé sur l'échec de la tentative de l'industrie automobile, expliquant que cette filière ne devait pas consommer des devises, mais bien au contraire en procurer. Mustapha Mekidèche a également proposé de revoir le modèle actuel de consommation d'énergie, de même que les subventions de manière générale, tout en mettant en place une protection et une inclusion sociale pour promouvoir une plus grande cohésion sociale. "Sans cohésion sociale, nous n'irons pas loin", a-t-il dit. Pour sa part, Ali Hached, ancien cadre au ministère de l'Energie, est revenu sur la raffinerie d'Augusta que Sonatrach a rachetée, fin 2018, expliquant que c'est un mensonge que de dire que cette plateforme a été alimentée en pétrole algérien. Ali Hached relève avoir alerté, en 2004, sur le fait que le pays allait rencontrer des problèmes de raffinage. "J'avais élaboré un rapport sur cette question et proposé des solutions", a-t-il rappelé. Mourad Goumiri, économiste et professeur associé, présent à cette conférence, a mis, lui, en relief le fait que l'élu local doit retrouver les prérogatives qui lui reviennent pour pouvoir gérer comme il faut les ressources, et faire bouger l'économie locale. Il a ajouté que l'Etat n'a cessé de réduire la marge de manœuvre des collectivités locales au profit du pouvoir central. De son côté, Noureddine Bouderba, militant syndicaliste, expert des questions sociales, insiste sur la nécessité d'améliorer le pouvoir d'achat des ménages, en proposant de relever le SNMG. M. Bouderba affirme ne pas être favorable à l'endettement extérieur, rappelant les conséquences résultant de la mise en application du programme d'ajustement structurel au début des années 1990. Le chargé de communication au Cnapest, Messaoud Boudiba, participant également à cette conférence, a dressé un tableau alarmant sur la situation sociale dans le pays, soulignant qu'il faudrait un salaire minimum de 80 000 DA pour qu'une famille algérienne composée de cinq membres puisse vivre à l'abri du besoin.