Après 28 ans d'existence, jalonnés de résistance et de luttes pour la citoyenneté, l'association Rassemblement Actions Jeunesse est dissoute suite à une procédure judiciaire engagée à son encontre par le ministère de l'Intérieur. Le FFS, le RCD, le PT et Amnesty International dénoncent un "grave" précédent. Après 28 ans d'existence, jalonnées de résistance et de luttes pour la citoyenneté, l'association Rassemblement Actions Jeunesse (RAJ) est dissoute à la suite d'une procédure judiciaire engagée à son encontre par le ministère de l'Intérieur. Le verdict qui a tenu en haleine les milieux militants, les acteurs politiques et associatifs durant plusieurs semaines a été prononcé, hier, par le tribunal administratif d'Alger. "Le juge, près le tribunal administratif d'Alger, vient de prononcer la dissolution de l'association RAJ, malgré le travail des avocats qui ont montré dans les requêtes et dans les plaidoiries que le dossier était vide dans le fond et dans la forme", a annoncé, dans un communiqué, l'association RAJ, tout en soulignant que les avocats ont pourtant réussi à déconstruire la requête du ministère de l'Intérieur qui est basée, soutiennent les rédacteurs du document, "sur des suppositions sans aucune preuve comme cela a été constaté par les juges du tribunal". En dépit de leur grosse déception et surtout leur consternation à l'annonce de ce verdict, les membres de cette association refusent de baisser les bras et encore moins de s'avouer vaincus. Au plan judiciaire, l'association affirme, d'ores et déjà, que ses avocats vont faire appel devant le Conseil d'Etat contre le jugement de dissolution rendu par le tribunal et parallèlement demander, en action séparée, au Conseil d'Etat de surseoir à l'exécution du jugement objet de l'appel. Le RAJ promet également de continuer à se battre pour défendre l'association, afin qu'elle continue d'exister. "Ce verdict ne va pas nous affaiblir, il n'effacera pas les 28 ans d'existence, de résistance et de lutte pour la citoyenneté, la liberté et la démocratie. Le RAJ est ancré dans la société et dans les esprits des militants algériens. Malgré cette décision injuste et aberrante, le RAJ va se battre et défendre l'association pour qu'elle continue à exister sur le terrain", écrit le RAJ dans son communiqué. Pour le président de l'association Abdelouahab Fersaoui que nous avons contacté, hier, ce "décevant verdict ne constitue pas moins qu'une atteinte à la liberté d'association et une remise en cause de l'un des acquis démocratiques d'Octobre 88". "Le RAJ a toujours joué son rôle d'association autonome et indépendante, elle fait partie des associations les plus visibles au niveau national et même international. La dissoudre signifie un recul énorme et flagrant et même dangereux pour la liberté d'association en Algérie", dit-il, tout en considérant que "ce verdict contre le RAJ est un verdict contre le mouvement associatif autonome en Algérie". "Personnellement, j'estime que c'est très inquiétant. Une association comme le RAJ mérite plutôt d'être encouragée vu le travail qu'elle accomplit sur le terrain. Or, nous recevons une requête qui demande sa dissolution, qui est d'ailleurs confirmée par le tribunal, alors que nous n'avons reçu aucune convocation, aucune mise en demeure et aucun courrier du ministère de l'Intérieur", déplore M. Fersaoui, expliquant encore que la requête est basée uniquement sur les activités que le RAJ a menées durant le Hirak, notamment les débats, les forums, les rencontres et les déclarations de ses responsables, et qu'il s'agit là, appuie-t-il, d'activités qui s'inscrivent dans ses objectifs. Abdelouahab Fersaoui se défend également d'avoir porté atteinte à l'unité nationale à travers l'association qu'il préside. "Nous considérons que l'unité nationale se renforce, se consolide par le respect des libertés. Aujourd'hui, nous avons besoin de l'Algérie de tous les Algériens, d'un mouvement associatif autonome, indépendant et qui joue son rôle de contre-pouvoir, qui a la capacité de critiquer, de donner son point de vue en toute liberté", a-t-il argumenté, estimant que justement, "l'association RAJ est dissoute parce qu'elle a un regard critique". "C'est une atteinte aux libertés démocratiques garanties par la Constitution et les conventions internationales que l'Algérie a ratifiées", a-t-il dénoncé non sans ajouter qu'il s'agit là d'un coup dur et même d'une menace pour la liberté d'association en Algérie, qui est un acquis de plusieurs générations de lutte depuis l'indépendance.