Après une courte accalmie, le phénomène de la harga reprend de plus belle, charriant de nouveaux drames humains dans une indifférence générale. Banalisée, la mort des migrants algériens en Méditerranée est devenue une tragique fatalité. Jusqu'à quand ? Un autre drame. Un drame de trop. Sept morts et huit survivants, dont une femme enceinte. Tel est le bilan macabre du naufrage d'une embarcation en fibre de verre équipée d'un moteur de 115 CV au large d'Arzew. L'information a été donnée, mardi dernier, par Francisco José Clemente Martin, du Centre international pour l'identification des migrants disparus (CIPIMD), et confirmée par des pêcheurs de Mers El-Hadjadj qui parlent, eux, de trois, voire de quatre corps repêchés. Ils évoquent également l'interception de deux aéroglisseurs transportant des harraga en direction des côtes espagnoles, toutefois en l'absence d'une réaction officielle confirmant ou infirmant l'information. En effet, le corps d'une des victimes de ce chavirement a été découvert à Arzew après avoir été rejeté par la mer. Il s'agit d'un universitaire qui s'est noyé après le naufrage, ces dernières 72 heures, de son embarcation, précise-t-on. Ces jeunes seraient originaires de la wilaya de Khenchela puisqu'un autre post fait état de la disparition d'une dizaine de jeunes originaires de cette wilaya de l'Est algérien, notamment des communes de Kaïs, de Chechar et de Tazouguert. Pour rappel, les côtes d'Arzew ont été, à plusieurs reprises, le théâtre de naufrages de bateaux de migrants clandestins comme ce fut le cas, en octobre dernier, quand un corps sans vie a été repêché à quelque 30 km au large d'Arzew. Ses deux compagnons de voyage ont pu être sauvés par les gardes-côtes après que leur embarcation a chaviré. En 2018, deux candidats à l'émigration clandestine ont trouvé la mort, noyés dans les mêmes eaux. 32 autres harraga, âgés entre 25 et 31 ans, dont une femme, avaient été sauvés. Un drame de plus qui renseigne sur l'étendue du désespoir qui frappe les Algériens et les risques qu'ils consentent à courir pour une vie meilleure ailleurs. Cet ailleurs, particulièrement localisé en Espagne, devient malheureusement de plus en plus hypothétique depuis que Madrid a décidé d'accélérer les expulsions des harraga après la visite, en novembre dernier, du ministre algérien de l'Intérieur dans la capitale espagnole. À propos de ces rapatriements forcés, Francisco José Clemente Martin indique que la police nationale d'Almeria et de Carthagène a embarqué, ces dernières heures, plus de 200 clandestins algériens dans des bus et des fourgonnettes en direction des différents CIE qui existent (ils sont huit) en Espagne. Ces harraga devront être expulsés dans les 60 jours vers l'Algérie, explique-t-il encore. Si avant, la plupart des migrants clandestins algériens étaient remis en liberté par les autorités espagnoles, les choses ont changé depuis août dernier. Ce sujet avait donné lieu à des tensions politiques en Espagne puisqu'en 2020, le gouvernement de Pedro Sanchez était accusé par l'opposition de faire preuve de laxisme. Un parti d'extrême droite et un syndicat de policiers avaient même exigé des sanctions contre les pays du Maghreb, dont l'Algérie, en réduisant le nombre de visas. Rappelons qu'après des discussions bilatérales, Madrid a pu arracher, en décembre 2020, un accord des autorités algériennes pour le retour des migrants en situation illégale sur le sol espagnol. Le quotidien El Pais avait confirmé l'information auprès du ministre espagnol de l'Intérieur, Fernando Grande-Marlaska, qui avait affirmé que "l'Algérie est le troisième pays d'Afrique du Nord à accepter à nouveau des expulsions, après le Maroc et la Mauritanie". Le site d'informations El Independiente indiquait, pour sa part, que le ministère de l'Intérieur espagnol avait fait appel aux services de la compagnie maritime Transmediterranée, afin de transporter les harraga vers leur pays. La même source avait précisé que ledit contrat stipulait que le transport des migrants algériens vers le port de Ghazaouet depuis celui d'Almeria devait se faire à raison de trois voyages par semaine. Pendant ce temps, les arrivées de harraga ne faiblissent pas, puisque l'on dénombre plus de 130 personnes – dont une majorité d'Algériens et une dizaine de Subsahariens – interceptés par les gardes-côtes espagnols ou secourus par les services maritimes des provinces côtières. Si la plupart des embarcations sont arrivées à bon port, nous sommes toujours sans nouvelles d'autres patères, dont un bateau de 5,30 m équipé d'un moteur de 115 CV, parti d'Alger, à 23h, pour les îles Baléares avec, à son bord, huit personnes, dont une femme et un nourrisson.