Les robes noires comptent ainsi protester contre la décision du gouvernement de les soumettre au même régime fiscal que les commerçants avec l'entrée en vigueur de la nouvelle loi de finances. Pour protester contre le nouveau système d'imposition auquel ils sont désormais soumis suite à l'adoption de la loi de finances 2022, les avocats ont décidé d'entrer en grève générale illimitée à compter du jeudi 13 janvier prochain. Cette action radicale a été prise à l'unanimité des barreaux des wilayas qui ont pris part, hier, à l'assemblée générale extraordinaire tenue par l'Union nationale des barreaux à Constantine à l'effet d'organiser la riposte à la décision du gouvernement de les soumettre au même régime fiscal que les commerçants avec l'entrée en vigueur de la nouvelle loi de finances. "Après un large débat, les représentants des barreaux au niveau national ont décidé à l'unanimité d'un boycott total de l'activité judiciaire. Il s'agit d'une décision courageuse prise souverainement par une assemblée générale à laquelle, pour la première fois dans l'histoire, tous les barreaux au niveau national ont participé", a déclaré le président de l'Union nationale des barreaux, Brahim Tayri, à la fin des travaux de cette rencontre nationale. Tout en exprimant son souhait de voir un dialogue s'ouvrir suite à cette décision, Brahim Tayri a expliqué que la démarche des avocats, s'inscrit dans le cadre de la protection du pouvoir d'achat des Algériens tant le nouveau système d'imposition que leur impose la loi de finances aura un impact lourd sur le citoyen justiciable. "Nous comptons diffuser un communiqué dans ce sens sinon même organiser une conférence de presse pour expliquer la portée de ces nouvelles mesures fiscales et leur retombée sur le pouvoir d'achat", a-t-il également annoncé à l'occasion. Interrogé à la fin de la rencontre, le bâtonnier de Tizi Ouzou, Me Salah Brahimi a expliqué qu'il s'agit en effet d'une assemblée générale extraordinaire à laquelle ont participé 23 sur les 24 ordres d'avocats existant sur le territoire national et qui a eu pour ordre du jour de traiter uniquement des nouvelles mesures d'impôt introduites dans la loi de finances 2022. "Nous étions soumis à l'impôt forfaitaire unique, (Ifu), de 12%, et depuis 2017 déjà nous avons proposé à la Direction générale des impôts un système d'impôt équitable pour les avocats, à savoir le système de retenue à la source et il n'a pas été accepté bien qu'il s'agisse d'un système qui garantit l'égalité devant l'impôt des avocats sur le territoire national et même pour mettre un terme au non-paiement des impôts puisqu'il y a des avocats qui ne sont pas déclarés aux impôts, et on nous a promis par le passé que nos doléances seront prises en considération, malheureusement, nous avons été surpris que non seulement ils ont refusé de prendre en charge notre doléance mais ont instauré un nouvel impôt qui est de 19% de TVA, ce qui se répercute sur le citoyen dans des moments pénibles pour notre pays, et nos impôts qui seront graduellement entre 20 et 35%, c'est-à-dire que nous serons appelés à payer environ 53%", a expliqué Me Brahimi soulignant que cette action est décidée après avoir vainement frappé à toutes les portes, à savoir la Direction générale des impôts, le ministère des Finances et saisi le président de la République par écrit, qui n'a pas daigné nous répondre. "Alors nous avons convoqué cette assemblée extraordinaire qui a décidé du boycott des audiences, sauf pour les dossiers qui sont tenus par les derniers délais tels que les pourvois, les appels et les oppositions...", a-t-il expliqué précisant que la balle est désormais dans le camp des pouvoirs publics qui ont fermé les portes. "Les avocats veulent juste payer un impôt équitable, transparent et de surcroît plus bénéfique pour l'Etat. Ce que nous allons prouver après s'ils acceptent l'impôt à la source, car nous allons payer plus d'impôts puisque le système actuel est caractérisé par des déperditions, un non-recouvrement, une fraude fiscale, et même des non-déclarés, cela n'existera plus avec le système du prélèvement à la source", a-t-il expliqué. Pour sa part, Me Kaci Rahem, du barreau de Tizi Ouzou, a tenu à préciser qu'il est inconcevable que les avocats soient considérés comme des commerçants. "Dans la loi de finances 2022, on a fait de nous des commerçants, ils nous font subir toutes les procédures applicables aux commerçants. C'est inadmissible ! Or, la proposition du prélèvement à la source est bénéfique autant pour eux que pour nous", a-t-il expliqué précisant que la goutte qui a fait déborder le vase c'est lorsque la directrice générale des impôts a refusé tout pourparler avec le président national de l'Union des barreaux. "Il a saisi le président au sujet de ces articles 31 et 16 qui concernent les avocats mais sans recevoir de réponse. Nous avons ressenti un certain mépris à l'endroit des avocats", a-t-il déploré. "Nous ne sommes pas des jusqu'auboutistes, nous acceptons de dialoguer mais pas au détriment de notre honneur", a-t-il conclu.