Le tribunal criminel de première instance près la cour d'Oran a condamné, hier, Ali Kh., 70 ans, à huit années de prison pour "intelligence avec l'étranger", en l'occurrence le Maroc, et " offense au président de la République" à travers des publications sur Facebook. Soupçonné d'espionner pour le compte du voisin de l'Ouest, Ali Kh., employé dans une mairie d'Oran, a été interpellé le 6 avril 2020. La perquisition de son domicile, situé dans le quartier de Yaghmoracen, a permis la saisie d'un ordinateur portable, quatre téléphones portables, des cartes SIM d'opérateurs algérien, marocain et français, deux passeports algérien et marocain et une carte d'enregistrement au consulat général du Maroc à Oran. Selon l'acte d'accusation, l'enquête diligentée par les services compétents est parvenue à démontrer que le suspect avait été recruté en 2005 par un attaché culturel du consulat (en réalité colonel de l'armée) avec pour mission de fournir toutes sortes de renseignements, principalement ceux portant sur les étudiants du Sahara occidental à Oran et, notamment, leurs lieux de résidence. En quelques années, l'homme a gagné la confiance des Marocains à tel point qu'il a désormais ses entrées au consulat d'Oran et dispose des coordonnées personnelles du consul général qui "salue son travail de renseignement". En 2008, Ali Kh. a introduit une demande de nationalité marocaine pour pouvoir se rendre au royaume chérifien où il a hérité de 350 hectares de terre lors du décès de sa mère, quelques années plus tôt. Une fois la nationalité en poche, en 2018, il se rend au Maroc où il rencontre le représentant d'une organisation non gouvernementale qui soutient la colonisation marocaine du Sahara occidental, à l'occasion d'une cérémonie d'inauguration d'un bureau de l'organisme. L'émissaire informe Ali Kh. que l'association ambitionne d'ouvrir une représentation en Algérie et souhaiterait lui en confier la gestion. En 2019, toujours selon l'acte d'accusation, l'homme entame les démarches, mais une avocate et conseillère du consulat général marocain le convainc de l'impossibilité d'une telle tâche dans un pays qui continue de soutenir le Sahara occidental. Dans le même temps, il collecte des renseignements sur l'évolution du mouvement du Hirak tout en diffusant sur les réseaux sociaux des publications portant atteinte aux symboles de l'Algérie. À la barre, Ali Kh. a nié l'ensemble des accusations qui pèsent sur lui et juré qu'il préférerait mourir que de porter atteinte à l'Algérie. Confronté par le juge à des enregistrements vocaux de ses échanges avec le consul général du Maroc et du représentant de l'association soutenant la marocanité du Sahara, l'accusé affirme qu'ils sont faux. "Ce n'est pas moi. Mon compte a été piraté et c'est pour cela qu'il y a des publications offensant le président de la République", répond-il en pestant contre la nationalité marocaine qui ne lui a jamais permis de récupérer son héritage. "J'ai été humilié au Maroc parce que je suis Algérien." Durant tout le procès, Ali Kh. a répété que ses liens avec le Maroc se résumaient à ses tentatives infructueuses de régler le dossier d'héritage. Dans son intervention, le représentant du ministère public a requis 20 années de réclusion criminelle assortie d'une amende de 500 000 DA en affirmant que les accusations étaient fondées.