Si les citoyens se mobilisent massivement lors du scrutin de jeudi, cela veut dire que l'on aura enfin entamé le véritable dénouement d'une crise, qui dure depuis l'indépendance, à savoir le problème de représentation. C'est là la conviction du président du RCD, qui a animé, hier après-midi, un meeting électoral au stade Oukil-Ramdane de Tizi Ouzou. “Cela voudra dire très concrètement que dans cette élection partielle, nous aurons imposé, sur une partie du territoire national, la primauté du civil sur le militaire”, dira le Dr Sadi, devant une foule nombreuse qu'il a exhortée à ne pas sous-estimer le vote de jeudi prochain. “Il n'y aura pas de presse libre, il n'y aura pas de justice indépendante, il n'y aura pas de stabilité nationale tant qu'une structure qui décide de tout et qui ne répond de rien n'est pas dissoute”, déclare-t-il à propos du DRS. “Une fois éliminée cette pieuvre, une fois les services de renseignements restitués à leur vocation de sécurité et non de police politique, il y aura toute latitude pour que les enfants d'Algérie construisent un Etat qui sera un instrument de développement et non un outil de répression”, préconise l'orateur. Car, pour le moment, l'Algérie est dans une situation de colonialisme intérieur avec ses caïdat, ses barbouzes, son deuxième collège, son code de l'indigénat et la spoliation permanente de la volonté populaire. C'est au dépassement de cette impasse que travaille cette élection du 24 novembre, dira encore Saïd Sadi. Celui-ci construit son argumentaire sur une conviction chevillée et une observation aiguë : “Le monde bouge. Les dictatures et les despotismes tombent les uns après les autres.” “Les Hissan Habré algériens ne peuvent plus faire peur aux Algériens, ils n'en ont pas pour longtemps”, prévient-il. L'élection partielle de jeudi pour laquelle le DRS s'est mobilisé pour la contrôler de bout en bout, n'est pas un scrutin ordinaire, selon le leader du RCD pour qui “le 8 avril 2004 a confirmé qu'il n'y avait ni volonté ni possibilité de restituer l'Etat à la Nation. Ce blocage rend encore plus impératif la maîtrise du pouvoir local”. Autrement dit, la démocratie nationale passe par la construction de la démocratie locale laquelle préfigure la refondation nationale. C'est cette perspective, à laquelle pourrait déboucher cette élection, si jamais il y a une forte mobilisation citoyenne, qui fait ruer le DRS dans les brancards, fera remarquer Sadi, qui a énuméré tous les éléments constitutifs d'une fraude annoncée. Ainsi pour lui, les chefs de daïra et les administrateurs sont briefés trois fois par semaine par le DRS pour organiser la fraude ; les listes électorales ont été falsifiées ; des milliers de citoyens originaires de Kabylie sont inscrits à leur insu sur les registres pour permettre aux militants du FLN et aux “indépendants” dotés de plusieurs cartes, de voter en leurs lieu et place; aucun signe distinctif ne figure sur les bulletins de vote. Ce sont là autant d'éléments qui corroborent les velléités de fraude que chapeaute la SM, que le président du RCD accuse de vouloir bloquer toute représentation crédible et efficiente. L'orateur exhibera un exemplaire de bulletin de vote “circulant dans les familles des proches” de la liste des indépendants pour la concorde à Béjaïa-ville, pilotée par un colonel du DRS. “Affaiblir la société, humilier la nation est devenu une religion d'Etat”, constate le chef de file des démocrates, martela-t-il sous un tonnerre d'applaudissements : “Les provocations et les agressions contre le RCD sont d'abord un signe d'affolement du DRS”. Saïd Sadi estime en revanche que si la participation au vote est importante, la fraude peut être considérablement réduite. “Cette élection est capitale. Si elle était aussi banale que le dit le DRS, il n'aurait pas mis en œuvre autant d'énergie et de moyens pour en fausser les résultats”, notera-t-il. Pour le leader de l'opposition démocratique, le DRS, dans cette élection, veut avoir des représentants du pouvoir au lieu de permettre à la population d'élire démocratiquement ses représentants. À l'adresse de la nombreuse assistance, estimée à des milliers de personnes, venue écouter presque religieusement le président du RCD, l'orateur dira que s'il y a une forte mobilisation et surtout une surveillance citoyenne des urnes, la fraude sera endiguée. YAHIA ARKAT