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La délinquance juvénile explose à Annaba
Faute de réelle prise en charge du problème
Publié dans Liberté le 24 - 11 - 2005

En l'espace d'une semaine, du 5 au 12 novembre, pas moins de 414 affaires de criminalité sous toutes ses formes ont été traitées par la police de Annaba mettant en cause 403 personnes.
Sur 72 présentations, 45 se sont soldées par des mandats de dépôt, et sur les 68 affaires relatives aux crimes et délits contre les personnes et les biens impliquant
69 délinquants, 14 concernent des mineurs, la plupart âgés de 15 à
17 ans. Ils sont 16 à avoir été présentés la semaine dernière au parquet et 3 ont été mis sous mandat de dépôt. Les efforts soutenus de la police, selon nos sources, parviennent difficilement à contrer une véritable explosion de délinquance juvénile qui se traduit sur le terrain par des vols à l'arrachée ou sous la menace d'arme blanche et d'agressions. Interrogé, un officier de la PJ devait affirmer : “Il s'agit principalement de la petite délinquance impliquant des sujets de plus en plus jeunes. Les bandes organisées dans le grand banditisme sont rares, et nous finissons toujours par remonter leurs filières”, devait déclarer un responsable de la police interrogé. C'est la gent féminine qui subit en grande partie ces préjudices car considérée comme une proie facile à plus d'un titre. “Les voyous ne trouvent pratiquement aucune résistance physique de la part de leur victime et ils misent beaucoup sur le fait qu'elles vont rarement jusqu'au dépôt de plainte et, le cas échéant, elles finissent pour la plupart à pardonner à leur agresseur devant le juge, sensibilisées par leur attitude de contrition rarement sincère”. De leur côté, les femmes, les jeunes filles en particulier, ainsi que les vieilles personnes vivent pour la plupart dans un climat d'insécurité permanent dès qu'elles mettent le pied dehors. Aucune n'ose porter une bague ou un collier, ou bien utiliser son portable dans la rue. Farida, 18 ans, a été abordée la semaine passée par deux jeunes qui avaient deviné la présence d'un portable dans la poche de sa veste, alors qu'elle se rendait au lycée Moubarek, sur le boulevard menant à Saint-Cloud. “Brusquement, j'ai senti le bout d'une lame contre mon dos et une voix m'a dit : “Choisis, ou tu me donnes ton portable ou tu me suis ! “ raconte la jeune fille encore sous le choc. Cette atmosphère d'insécurité exacerbée règne également dans le train qui mène les étudiants vers l'université de Sidi Amar, laissé pratiquement sans protection par les responsables. Des jeunes délinquants à la mine patibulaire montent dans les wagons, lorgnant sans vergogne les jeunes étudiantes terrorisées et sans défense. Gare à celle qui, par inadvertance, leur jette un regard inquisiteur ! C'est aussitôt l'agression verbale et souvent physique, sans parler des vols. Selon des sources sûres, il y aurait entre 20 et 40 agressions par jour dans la wilaya, malgré la forte présence de la police. Au cours du mois de ramadan, les services de sécurité avaient renforcé leurs effectifs de 18 brigades supplémentaires, spécialisées dans le travail de proximité. En un mois, 192 délinquants ont été mis sous les verrous, pour la plupart des adolescents. Ils ont écopé de peines ne dépassant pas les 11 mois et ont donc pu bénéficier de la grâce présidentielle. Ils sont à nouveau dans la rue. Combien vont se repentir sincèrement et reprendre le droit chemin, alors qu'ils n'ont même pas eu le temps de payer leur dette à la société et réfléchir sur les conséquences de leurs actes ? C'est une question posée par une employée d'administration qui a vu son agresseur de nouveau dans la rue, la narguant, alors qu'il lui avait laissé, quelques jours auparavant, les oreilles en sang en lui arrachant brusquement ses boucles avant de s'enfuir. Pour la police, la chose est claire : “Nous sommes les auxiliaires de la justice et notre rôle est d'exécuter ses ordres. S'il faut appréhender cent fois un délinquant qui sera gracié le lendemain, nous le ferons, c'est notre travail”. Déclarer que seule une réelle prise en charge de cette frange fragile de la population de la part de l'Etat, conjuguée au travail de la société civile dans le cadre des associations, pourrait réellement mettre un terme, ou du moins, diminuer tout le gâchis de cette jeunesse livrée à elle-même. Une véritable lapalissade. “Un délinquant entouré, suivi, dirigé vers un travail ou une formation qui aboutirait à des débouchées réelles, résultant d'initiatives diverses et constructives, pourrait s'en sortir et revenir dans le droit chemin. La jeunesse a un grand besoin que l'on s'occupe d'elle et c'est, en grande partie, le rôle de la société civile appuyée par l'Etat”, avait récemment déclaré un responsable de la prison de Annaba, qui a ajouté que la majorité des jeunes détenus viennent de la couche la plus défavorisée de la population. Quand on sait que la wilaya compte, toutes disciplines confondues, plus de mille associations.
Hafiza M.


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