Pour Hubert Védrine, l'ancien ministre français des Affaires étrangères, l'Algérie recèle d'énormes ressources. Il invite les hommes d'affaires de l'Hexagone à dépolitiser leurs intentions, c'est-à-dire à s'impliquer dans le pays, sans rien attendre de décisions politiques. Le groupe CIC banque envisage de s'implanter en Algérie. C'est ce qu'a déclaré M. Michel Lucas, président du directoire du groupe CIC, le 23 novembre dernier, et ce, à l'occasion d'un colloque organisé par le club CIC International à Marseille sous le thème “Les pays du Maghreb, un relais de croissance pour les entreprises françaises”. Sans donner de date précise autre que “cela pourrait se faire dans quelques mois ou quelques années”, il laissera entendre que l'Algérie intéresse son groupe pour le potentiel qu'elle affiche, justifiant, par ailleurs, la présence de l'enseigne CIC à Alger à travers une représentation réelle dirigée par M. Mostefaoui. Le premier responsable du groupe CIC, soulignant l'ouverture réelle des 3 pays du Maghreb, rappellera également le rôle actif de sa banque en Tunisie et au Maroc. En effet, en Tunisie, le CIC détient 25% du capital de la Banque de Tunisie, alors qu'au Maroc il contrôle 10% du capital de la Banque marocaine du commerce extérieur. Dans ce schéma, ne manque plus que l'Algérie qui a, cependant, été représentée à ce colloque par le premier responsable de la BEA, M. Mohamed Loukal, auteur d'une pertinente intervention, selon les propos des hommes d'affaires français présents en force à cette occasion. Nuançant ses propos, le P-DG de la BEA dira que “les investisseurs étrangers sont en train de revenir en Algérie, pays qu'ils connaissaient bien”, avant de relever la stabilité réglementaire et la sécurité juridique pour tout investissement direct étranger. Interrogé par l'animateur des débats, M. Vincent Perrault, journaliste de la chaîne française d'informations LCI, qui voulait en savoir davantage sur les arguments du marché algérien, le banquier algérien rappellera les réformes en cours, notamment dans le secteur bancaire où on enregistre, selon lui, pas moins de 27 institutions privées internationales, et ce, sans omettre de souligner la possibilité accordée aux entreprises étrangères de transférer librement leurs dividendes. “Nos lois suscitent et protègent les IDE. Les banques commerciales sont désormais autorisées à prendre en charge les aspects liés aux libres transferts de dividendes. Les ouvertures sont là, et le marché algérien est en pleine mutation. Pas moins de 1 200 entreprises sont à privatiser, y compris les banques. L'Algérie travaille dans une logique inscrivant l'émergence des PME en priorité”, déclare le président de la BEA, relayé dans ses propos par Djamel Eddine Benaoum, ministre-conseiller auprès de l'ambassade d'Algérie à Paris. Le colloque, qui a enregistré une participation record, selon les organisateurs qui évoquent plus de 1 000 hommes d'affaires français, tous clients du CIC, aura été une occasion de faire connaître les nouveaux contours du marché algérien, avec les chiffres clés liés à la maîtrise de l'inflation, la baisse des taux d'intérêt bancaires et surtout la formidable cagnotte de 60 milliards de dollars, découlant du plan de soutien à la relance économique. Pour sa part, M. Hubert Védrine, ancien ministre des Affaires étrangères et membre du Conseil d'état français, qui intervenait également à ce colloque, considère que l'Algérie recèle d'énormes ressources “grâce aux hydrocarbures”. Il invitera les hommes d'affaires présents à dépolitiser leurs intentions d'affaires et à “ne rien attendre des décisions politiques. Vous êtes la chair de vos projets”, martèlera l'ancien chef de file de la diplomatie française, qui tirera à boulets rouges sur le processus de Barcelone, considérant que celui-ci a été avare en matière de soutien en direction des pays méditerranéens. “Seulement 3 milliards d'euros ont été réservés contre 20 milliards débloqués au bénéfice des pays d'Europe orientale”, a rappelé l'ancien ministre. Sans réserves, Hubert Védrine considère que pour la Grande-Bretagne, qui préside actuellement l'Union européenne, “le Maghreb n'est pas une priorité”. Emettant franchement des doutes sur la possibilité pour les pays du Maghreb de construire une zone de coopération économique, il dira : “On espère depuis longtemps la mise en place d'une Union maghrébine, mais cela n'a pas été possible à ce jour.” C'est pourquoi, relève-t-il, “les responsabilités sont entre les mains des entrepreneurs, des hommes d'affaires et des banquiers”. A. A.