La machine juridico-policière mise en branle voilà deux ans, pour mettre à genoux les journalistes de la presse privée et annihiler toute velléité d'indépendance des médias algériens, a franchi le seuil de l'intolérable concernant Mohamed Benchicou. Enfermé à El-Harrach depuis le 14 juin 2004, abandonné sans soins médicaux appropriés pour stopper la progression de sa maladie, le directeur du Matin ne compte plus les coups tordus d'un régime vouant une haine tenace à la liberté et aux hommes libres : c'est ainsi que le journaliste subit jusqu'au fond de sa cellule et loin des regards un acharnement inqualifiable, exécuté sous “couverture légale”. De retour dans sa cellule d'où il a été extrait, en 18 mois d'enfermement, pas moins de 33 fois afin d'être jugé pour diffamation par le tribunal d'Alger, Mohamed Benchicou s'est vu conduire devant une commissaire de police, venue lui signifier deux nouvelles plaintes introduites en 2003 et 2004. Avec un total s'élevant à ce jour à 34 affaires pour délits de presse émanant pour la plupart de dignitaires du régime, le journaliste Mohamed Benchicou passe pour le plus dangereux des “criminels” que l'Algérie connaisse. En tout état de cause, la commissaire de police qui s'est présentée à El-Harrach, munie d'une machine à écrire, pour interroger et dresser des procès-verbaux à Benchicou s'est vu opposer le refus du concerné de se soumettre à l'interrogatoire : le directeur du Matin s'en tenant à la décision, dans les affaires de presse, de ne répondre qu'au juge en dehors de tout autre autorité quelle qu'elle soit. Décision prise solidairement par les éditeurs de presse en août 2003. Indigné par de tels procédés, le Comité Benchicou pour les Libertés s'élève avec vigueur contre l'acharnement caractérisé ciblant le directeur du Matin et exécuté honteusement par des institutions la République, sous une couverture “légale”. Une nouvelle fois, il prend à témoin l'opinion nationale et internationale des dérives liberticides du régime algérien. Par la même occasion, le Comité Benchicou pour les Libertés exprime son extrême inquiétude suite aux derniers verdicts prononcés par la cour d'Alger à l'encontre de plusieurs journalistes (jusqu'à une année de prison ferme et même dans des cas de retrait de plaintes par leurs auteurs). Ce durcissement annonce un avenir des plus sombres pour la liberté de la presse et la liberté d'expression, d'autant que les pouvoirs publics ne manifestent aucune intention de dépénaliser les délits de presse, malgré son prétendu respect des libertés fondamentales.