Le cauchemar continue pour Bush dans son “propre jardin”. Après le Chili, qui a remis les clefs du pouvoir à une fidèle d'Allende le socialiste, c'est au tour de la Bolivie de faire un pied de nez au plus conservateurs des locataires de la Maison-Blanche. Une nouvelle histoire de la Bolivie commence. Les larmes aux yeux, de son fief de Cochabamba, dans le centre du pays, Evo Morales, le leader indien de la gauche bolivienne, s'est proclamé vainqueur de l'élection présidentielle, sur la foi de sondages de sortie des urnes mais sans attendre la proclamation de résultats officiels par la Cour nationale électorale (CNE). Ses principaux adversaires ont implicitement reconnu sa victoire. Au même moment, plusieurs milliers de personnes défilaient dans les rues de la ville : “Evo président, le pays répond présent !” Dix ans après qu'il a fondé le Mouvement vers le socialisme, vingt ans après son entrée dans le syndicalisme paysan auprès des petits cultivateurs de feuilles de coca boliviens, Morales, 46 ans, qui se réclame à la fois du Cubain Fidel Castro et du Vénézuélien Hugo Chavez, a balayé les partis traditionnels qui se partageaient le pouvoir depuis la fin de la dictature, en 1982. La coca est considérée comme une culture traditionnelle par les Indiens et Morales s'affrontera dès lors à Washington, qui finance en Bolivie une politique d'éradication de cette plante pour lutter contre le trafic de cocaïne. Derrière la Colombie et le Pérou, la Bolivie est le troisième plus grand producteur de cocaïne de la région. Depuis dix ans, le MAS s'est fait le porte-parole d'intenses mouvements sociaux, qui luttent notamment pour la renationalisation de services publics tels que la distribution d'eau ou des immenses réserves de gaz naturel, exploitées par des multinationales et acheminés vers les Etats-Unis.