Elle vit sur les lieux avec ses enfants depuis 35 ans. Un litige l'opposant à son voisin pour un terrain commun risque de dégénérer en catastrophe. Trinh Thi Bich Lien est arrivée en Algérie en 1970 avec son mari Refazine Yacoub, un Algérien moudjahid du Vietnam rapatrié par le défunt président Houari Boumedienne au même titre que soixante-dix familles algériennes qui se trouvaient dans ce pays ami. Le couple s'installe sur un terrain en friche situé au chemin des ruines à Tamentfoust, dans la commune d'El Marsa, et commence à le mettre en valeur en cultivant des légumes pour faire nourrir la petite famille à très faible revenu. Des années durant, cette famille, agrandie de quatre enfants, n'a jamais été inquiétée ni par les autorités (APC) ni encore moins par les services compétents (agriculture, Agerfa), ce qui n'a pas suscité d'engouement auprès du père de famille à demander une quelconque régularisation auprès de ces derniers. Une situation qu'hériteront ses enfants après sa mort en 1988. Dans les années 1990, alors que toute la région était sous le diktat terroriste, la veuve Refazine ne quitte pas les lieux. Elle écrit au wali de Boumerdès en 1996 pour lui demander une régularisation (vente du terrain qu'elle occupe) qui lui sera accordée par ce responsable. Contre toute attente, le DEC d'El Marsa prend d'autres mesures en attribuant les lots de terrain à des personnes influentes de l'époque, “bradant au passage le terrain occupé par cette famille”, comme le souligne Ali Refazine, son fils. C'est ainsi qu'une partie de ce terrain s'est retrouvée propriété du voisin immédiat qui ne cesse de réclamer, sachant qu'il est en possession d'un acte légal. Le problème qui se pose aujourd'hui est de taille, car sur le terrain, objet de litige, est construite la maison familiale des Refazine (une villa R+2) qu'ils ne tiennent pas à quitter compte tenu de plusieurs années de sacrifices pour la bâtir. De l'autre côté, le voisin, fort d'un document officiel, ne veut pas en démordre malgré l'invitation à la réconciliation à l'amiable de la famille concernée. “Je lui ai proposé la somme de 140 millions de centimes pour les 70 m2 qu'il a refusée. En revanche, il m'a fait savoir qu'il exigeait la partie bâtie sur son lot, ce qui reviendrait à la moitié de la villa. Sinon, ce serait carrément la démolition. Un marché déloyal”, confie Ali Refazine. Cette démolition, comme l'explique ce dernier, ne serait, d'ailleurs, pas sans gravité sur l'ensemble de la construction. Le PV de constatation de l'expert sollicité à cet effet est assez éloquent : “L'immeuble bâti a une façade de 14,25 ml bâtie. Si on doit procéder à la démolition d'une partie du bâti, à savoir 6,08 ml, les règles du béton armé ne le permettraient pas vu que la structure serait touchée, à savoir les poteaux et les poutres, ce qui conduirait à la démolition totale de l'immeuble”, y précise-t-on. Autrement dit, si l'action en justice en faveur du voisin venait à être exécutée, cette famille se retrouverait purement et simplement à la rue ou encore vivre sous l'épée de Damoclès. À l'APC d'El Marsa, le dossier est bien connu. On ne veut surtout pas se mêler de cette affaire qui relève de la justice. M. Ahmed Hammad, vice-président, nous a éclairé à ce sujet. Selon lui, le voisin, partie prenante du litige, est dans ses droits car en possession d'un acte de propriété établi par un ancien responsable de la commune. “Nous connaissons toute cette famille installée depuis plus de 30 ans à Tamentfoust. Ce problème dépasse l'APC même si nous soutenons la cause des plaignants. Notre intervention ne devrait aucunement faire preuve de force. Bien au contraire, nous essayerons, dans la mesure du possible, de jouer un rôle d'intermédiaire sans entraver les intérêts de l'une ou l'autre partie engagées dans ce litige”, dira-t-il. Pour sa part, la veuve a saisi à deux reprises Son Excellence l'Ambassadeur du Vietnam à Alger sur son cas. Deux correspondances ont été adressées par la mission diplomatique à la direction des affaires consulaires (AE) qui n'ont pas connu d'aboutissement jusqu'à l'heure actuelle. Le seul espoir pour cette famille viendrait peut-être des autorités locales (wali délégué, P/APC) pour une éventuelle réconciliation des deux voisins. La solution existe, c'est une question de volonté. À défaut, le premier magistrat du pays est interpellé. A. F.