Le phénomène touche les cosmétiques, les pièces détachées, les vêtements, les articles scolaires… Des chiffres effarants sur la contrefaçon en Algérie ont été présentés, hier, lors d'un atelier de travail organisé par le groupe Entreprendre, à la salle de conférences d'El-Hamma d'Alger. La circulation de contrefaçons produites localement ou importées s'est développée en Algérie depuis la libéralisation du commerce extérieur en 1991 et touche aujourd'hui une grande variété de produits, depuis les parfums et les cosmétiques, en passant par le prêt-à-porter, les pièces détachées de voitures, les cigarettes, l'électroménager, les logiciels informatiques ou encore les livres. En dépit de la conformité des différents dispositifs avec les exigences des accords Adpic de l'OMC, la contrefaçon est en augmentation en Algérie du fait principalement de la méconnaissance des règles et procédures en vigueur par les opérateurs économiques et de l'insuffisance des moyens de contrôle. M. Mokrane Hennoun, cadre chargé de la lutte contre la contrefaçon à la direction générale de la douane, avance que 800 000 produits ont été retenus en sous-douane en 2004, soupçonnés d'être contrefaits, suite à des demandes introduites par les titulaires de droits. En 2005, sur le cinq premiers mois seulement 300 000 produits sont concernés. Ces produits touchent généralement les pièces de rechange automobile, les vêtements, les articles scolaires… mais pas de médicaments. M. Mokrane Hennoun avance que ces produits, soupçonnés de contrefaçon, proviennent notamment de Chine et de Turquie. Mais la directrice de l'Inapi, Mlle Nabila Kadri, précise aussi que la contrefaçon pourrait être aussi locale. Pour rappel, selon le ministère du Commerce plus de 40% des produits contrefaits sont produits localement, 41% sont des produits d'importation et 18% de ces produits d'importation ne sont pas identifiés. La méconnaissance des règles et procédures en vigueur par les opérateurs économiques fait que les plaintes déposées ne sont pas nombreuses. La directrice de l'Inapi parle de 70 litiges qui sont pendants. Par rapport à l'ampleur du phénomène, le chiffre peut paraître dérisoire. Mais voilà ce n'est pas évident d'obtenir réparation. L'entreprise BCR, très connue, dont les produits ont fait l'objet de contrefaçon, a été déboutée dans quatre cas par la justice. Le renforcement en amont des contrôles sur le terrain et la formation de magistrats qualifiés pour les arbitrages de litiges relevant du domaine de la propriété industrielle sont indispensables pour lutter efficacement contre la contrefaçon. En matière de droit d'auteur, le phénomène est encore plus prononcé. Le développement des moyens technologiques en Algérie (selon M. Taousar Hakim, directeur général de l'Onda, 5 000 cybercafés sont inscrits sur le registre du commerce, il y a 103 entreprises de prestation informatique, 1 800 libraires et autres commerces vendent accessoirement les phonographes et vidéogrammes, plus de 15 marchés informels ont été identifiés) rend la tâche plus compliquée aux contrôleurs du reste peu nombreux. M. Taousar Hakim, évoquant l'évaluation du phénomène, relève que le taux de contrefaçon au niveau des cassettes audio serait de 38%, pour le compact disque le taux est de 72%. Concernant les cassettes vidéo, le taux de contrefaçon est estimé à 45%. Selon une étude, le taux de contrefaçon sur les programmes ordinateurs, en 2003, a été de 84%. L'Algérie est classée à la 7e place juste derrière les pays asiatiques, champions de la contrefaçon. En 2004, le taux a baissé pour atteindre 83%. L'Algérie “a amélioré” son classement pour se situer à la 9e position. Quant à l'impact économique, le directeur général de l'Office national des droits d'auteurs estime que le Trésor public a enregistré une moins-value de plus de 38 millions de dinars de taxe sur l'activité professionnelle (TAP) par an et de plus de 333 millions de dinars par an en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Sur les droits d'auteur, le manque à gagner est de 207 millions de dinars par an. Meziane Rabhi