Comme à chaque approche de la fête de l'Aïd el kébir, les stars sont de retour à Annaba, comme à Souk Ahras, El Tarf ou Guelma. Elles sont toutes là. Elles ne sont pas des athlètes, ni des acteurs ou des chanteurs. Moins encore des mannequins. Ce sont tout simplement des moutons : les stars de la “corrida”. Cependant, ces derniers ne sont pas comme les autres “kebch”, ils réapparaissent uniquement à chaque fête de l'Aïd, mais, eux, ils sont épargnés du rituel du sacrifice. Ces “gladiateurs” sont dressés et préparés spécialement pour les combats qui sont organisés, non seulement dans les villes, mais aussi dans les villages et les bourgs. À Annaba, on les appelle les “ragadins" et ils coûtent très cher. Un peu trop cher même pour les pères de famille. D'ailleurs leur nombre est très limité et se comptent sur les doigts d'une main. Ainsi, les bêtes de combat avec leurs fans et leurs bookmakers sont de retour. Depuis un certain temps, ils sont le sujet number one des discussions des mordus de ce sport singulier. Autrefois, on les a surnommés “Sbaâ” (lion), le tueur, “Saroukh” (missile), “Safah” (prédateur), “Dagdoug”, “Guendouz”, “Messaoud”. Aujourd'hui, ces bagarreurs ont changé de nom. Ce sont les “Kiki”, “Beckahm”, “Ronaldo”, “Terminator”, “Immortel”, etc. Ces “combattants” vénérés font l'objet de tous les soins et égards : toison souvent teintée au henné, coiffés chez des professionnels, bichonnés et fardés jusqu'à leur donner l'allure de lion. Ces moutons rares, qui sont également dorlotés et chouchoutés, ont pour unique mission la bagarre. La confrontation c'est, d'ailleurs, leur domaine. Choisis dès leur jeune âge, selon leur gabarit, élevés dans des étables loin des regards et entraînés à la bagarre, ces bêtes, qui seront également suivies régulièrement par des “toubibs”, seront bons pour le combat dès leur première année. Mais, à partir de leur troisième année d'âge, elles seront de véritables champions, explique un spécialiste en la matière. Déjà les joutes et les championnats qu'organisent les bookmakers dans des endroits, autrefois discrets sauf pour les adeptes, mais aujourd'hui, connus par tout le monde, attirent de plus en plus les parieurs. Les spectateurs qui se déplacent pour assister à un combat organisé des propriétaires de “Ragadins” dépassent largement ceux qui se déplacent au stade à l'occasion des rencontres de football. Cet empressement s'explique par l'enjeu : souvent des véhicules étaient mis en jeu par les organisateurs. Mieux encore, aujourd'hui les meilleurs combats sont filmés et gravés sur des CD et commercialisés sur le marché. C'est le cas du combat farouche ayant opposé, à Souk-Ahras, “Kiki” à “Beckham” où l'on peut voir une bagarre de 90 coups de cornes. B. B.