Un nouveau lieu culturel est né par la volonté de deux personnes, Nacéra Saïdi et Tahar Arezki, ancien directeur du théâtre régional de Béjaïa. Dans la devanture de la librairie Espace Noune sont exposés des ouvrages de Maria Rilke, René Char, Djalal Eddine Er'roumi, Nazim Hikmet, Mahmoud Darwich, Jean Sénac, Si Mohand u m'hand, Fouad Negm, Pablo Neruda… Autant d'auteurs, autant d'époques, de langues et de préoccupations. Seule la poésie préside à cette assemblée, réunie, depuis jeudi dernier, au 35, rue Mustapha-El-Wali (Ex-Debussy). Car à cette adresse, un nouveau lieu culturel est né par la volonté de deux personnes, Nacéra Saïdi et Tahar Arezki, ancien directeur du théâtre régional de Béjaïa. “Nous considérons la poésie tutelle de cet espace. Pour nous, il est important de faire lire la poésie, que l'on puisse organiser des animations littéraires et des lectures de poésie.” Mais avant qu'il ne s'agisse du Noune des soufis ou celui de la mythologie égyptienne, Espace noune est dédié aux belles lettres et aux rencontres autour de tout ce qui fait l'esthétique : la musique, la littérature, la photographie, la peinture… La librairie propose des titres de référence en sociologie, religion, économie…, c'est-à-dire les livres qui “poussent à la réflexion. Il est primordial, pour nous, que les deux langues, arabe et français, soient représentées. Car il est également important que le lectorat algérien connaisse les préoccupations des intellectuels arabes et leurs visions concernant, par exemple, la démocratie, l'islam”. Aux deux niveaux qui constituent ce nouvel espace culturel, dont la capitale et surtout les autres villes du pays ont réellement besoin, des livres sont exposés de manière aérée afin de permettre au regard d'avoir le temps de s'imprégner des titres proposés et d'en chercher, peut-être, un autre. Ainsi donc, Nacéra Saïdi et Arezki Tahar, après quelques années de préparation, ont fini par prendre le challenge. L'inauguration d'une librairie en Algérie ne se fait pas toujours dans un environnement favorable, à commencer par cet handicap de taille : le prix des livres. Mais les deux complices sont conscients de cette situation. À cela, ils rétorquent : “Le problème est de persister à avoir des livres que les gens demandent. Concernant les prix, nos revendications sont similaires à celles de tous les autres libraires : il faut une politique nationale du livre. Il ne faut pas sous-estimer l'enthousiasme des Algériens lorsqu'il s'agit de lecture.” Et quand il est question de lecture et de langue, le noune, la lettre, est le symbole du fondement, de la perpétuation. Le noune a souvent une connotation féminine et évoque ce qui est caché dans les profondeurs. Dans la mythologie égyptienne, tous les dieux sont issus du noune, les eaux primordiales qui sont à l'origine de toute la création. Mais sans aller jusqu'à implorer une quelconque divinité pharaonique, Arezki Tahar s'en remet au noune des poètes bien plus proches de nous : Bensahla, Bentriki, Benmsaïb… “Le noune est un encrage qui se veut autant d'authenticité nationale qu'universelle.” Tout un programme. Comme ceux que nous promet Espace Noune. Samir Benmalek