Ils s'agit de maçons, plombiers, manœuvres, électriciens… toute une main-d'œuvre nécessaire pour bâtir un immeuble, y courbent l'échine, en dépit des risques et périls sans aucune garantie ou assurance, puisque leurs "employeurs" ni les déclarent à l'assurance ni cotisent en leur faveur à la caisse de retraite pour qu'ils puissent bénéficier un jour de quelque pension. Eparpillés dans des bourgades, presque partout en Kabylie, les travailleurs “clandestins”, comme on les appelle dans la localité de Yakouren (48 km à l'est de Tizi Ouzou) se comptent par centaines, la plupart d'entre eux exercent dans le bâtiment. Des chantiers privés de dix à quinze ouvriers — leur nombre diffère d'un chantier à l'autre — recrutés suivant l'importance des besoins et les tâches à accomplir, sont implantés ça et là. Maçons, plombiers, manœuvres, électriciens… toute une main-d'œuvre nécessaire pour bâtir un immeuble, y courbent l'échine, en dépit des risques et périls, car leurs "employeurs", telles des sangsues, ni les déclarent à l'assurance ni cotisent en leur faveur à la Caisse de retraite pour qu'ils puissent bénéficier un jour de quelque pension. En été comme en hiver, qu'il fasse 50° à l'ombre, qu'il gèle ou qu'il vente, ces malheureux “clandestins”, pour lesquels tout emploi est le bienvenu, sont obligés de bosser, de se faire exploiter, pour subvenir aux besoins de leurs familles. Week-end, jour de repos, horaire de travail, congé de maladie, vacances d'été…, sont des termes qui n'existent pas dans leur vocabulaire. Ils travaillent à longueur d'année, tout à fait conscients des risques encourus. Ils n'ont pas le choix. le contrôle pour eux “n'existe pas ; ça n'existe plus depuis des décades”. Non déclarés donc par leurs “exploitants”, ils ne bénéficient d'aucune couverture médicale en cas d'accident du travail ou de maladie. “J'ai attrapé une hernie discale due aux énormes poids que je soulevais jadis dans les chantiers, comme les sacs de ciments de 50 kg par exemple ; le médecin m'a ordonné l'arrêt définitif de toute activité physique, mais je suis obligé de travailler pour faire vivre ma famille”, nous dira un maçon, le dos courbé à cause de la maladie dont il souffre. Rémunérés entre 400 et 500 DA la journée, ces jeunes sont exploités sans qu'ils se rendent compte de l'arnaque pure et simple dont ils se retrouvent victimes. Et en cas d'accident du travail, ces derniers, sans moyens pour se défendre, n'osent même pas poursuivre leurs tyrans employeurs en justice pour réclamer leur droit. De surcroît, ces derniers ont tout le choix de recruter, des wilayas limitrophes, une main-d'œuvre qui ne daigne même pas rechigner des conditions défavorables qu'elle rencontre dans ce travail qu'elle accomplit pour une miche de pain. Hacène AOUIDAD