Il reste à se demander si le temps n'est pas venu de doter les régions de pouvoir de décision et de moyens à même de leur permettre, non pas seulement de parer aux situations d'urgence extrême, mais aussi d'assurer au quotidien une gestion saine des collectivités. Les violentes intempéries, qui ont touché toute la partie nord du pays, durant ce week-end, viennent rappeler, par leur seul bilan, la précarité dans laquelle vivent —végètent serait plus approprié — les populations rurales. Elles mettent à nu, également, l'incapacité des collectivités locales, souvent livrées à elles-mêmes, dépourvues de moyens et sans réelles prérogatives, à faire face à de telles situations avec la célérité et l'efficacité requises. A l'est, à l'ouest comme au centre du pays, elles n'ont pu, au grand dam des familles durement frappées par le déluge, que constater les dégâts, tragiques par endroits, avant de songer à prendre des mesures qui, dans la plupart des cas, se sont révélées peu réconfortantes pour les victimes. Les autorités centrales, de leur côté, sont restées sans réaction immédiate, et il ne fallait sans doute pas s'attendre à mieux : leur passivité à l'annonce de la terrible catastrophe de Bab El-Oued, en novembre 2001 est encore trop présente dans les mémoires pour que l'on oublie l'incroyable insouciance dont nos gouvernants peuvent être capables devant une tragédie nationale. Ce constat étant établi, il reste à se demander si le temps n'est pas venu de doter les régions de pouvoirs de décision et de moyens à même de leur permettre, non pas seulement de parer aux situations d'urgence extrême, mais aussi d'assurer au quotidien une gestion saine des collectivités. S'il est vrai que la décentralisation a toujours été un thème omniprésent dans le discours officiel, y compris durant l'ère du parti unique, elle a été souvent contrecarrée par les appétits gloutons des décideurs, mais aussi et surtout par la crainte des tenants de l'Etat central de devoir céder leur pouvoir, en partie ou en totalité. C'est pourtant connu, le pouvoir s'exerce bien par le moyen d'une bonne gouvernance. A défaut on le cède... ou on le perd. Chez nous, il semble que des trois options, seules les deux dernières sont de mise, désormais. Moralité : le pouvoir lui-même n'échappe plus à la précarité ambiante et les émeutes qui éclatent de manière cyclique, ces deux dernières années, dans toutes les régions du pays, en sont un signe. Une décentralisation réfléchie et judicieusement mise en œuvre pourrait épargner au pays les contrecoups et les désordres que provoquerait une telle passation si elle devait intervenir sans consensus préalable. S. C.