La colère des citoyens a grondé, lundi et mardi, à Béthioua, une ville pétrochimique, située à 60 km d'Oran, après des heurts avec les forces de sécurité qui tentaient d'empêcher un regroupement auquel ont pris part des élus locaux. 20 personnes ont été blessées, dont un citoyen grièvement atteint à la tête et 30 arrestations ont été enregistrées parmi les manifestants qui observaient un sit-in de protestation demandant le départ de l'actuel P/APC, issu du FLN. La situation était tout particulièrement tendue, avant-hier, à Béthioua, qui connaît sa plus grande flambée de colère depuis les derniers incidents survenus au mois de ramadhan. Les évènements d'hier ont failli tourner à la catastrophe, n'eut été la présence d'esprit des protestataires qui se sont massés devant le bâtiment de l'APC pour se mettre à l'abri du gaz des bombes lacrymogènes lancées par les forces de l'ordre. Nous apprenons que des enfants en bas âge ont été transférés à l'hôpital de Béthioua pour recevoir des soins intensifs. Deux d'entre eux sont toujours gardés au service des urgences où ils sont soignés par des médecins du CHU d'Oran. Un témoin oculaire raconte, choqué : “On tenait un sit-in pacifique devant le siège de l'APC, lorsque des policiers ont commencé à nous injurier. On n'a pas voulu répondre aux provocations jusqu'au moment où des gendarmes nous ont attaqués”. Cela s'est passé aux environs de 18h30, suite à l'arrestation de M. Ghazi Moussadek, un élu du PNSD, faisant aussitôt monter la tension d'un cran. Cette arrestation a immédiatement suscité un climat d'émeute et un mouvement de colère de la part des habitants, rassemblés en masse devant le siège de l'APC. Malgré la coupure du courant électrique, des échauffourées d'une rare violence opposant manifestants et forces de l'ordre se sont déroulées dans plusieurs quartiers de Béthioua jusqu'à 21h30. Aux cris de “Monsieur le Président agissez avant qu'il ne soit trop tard”, des citoyens tentaient de rallier à leur cause des éléments des forces de l'ordre qui “ont continué à nous jeter des bombes lacrymogènes, en dépit du bien-fondé de notre action pacifique”, témoigne un coiffeur arrêté chez lui par les services de sécurité puis relâché. La foule, qui avait du mal à contenir sa colère, a scandé des slogans hostiles au P/APC qu'elle accuse de laxiste dans le “traitement des affaires des humbles citoyens”. Hier, à midi, tous les commerces ont baissé rideau suite à des “injonctions des autorités locales”, affirme un commerçant. Craignant sans doute un débordement de la situation, une centaine de policiers antiémeutes a pris position devant le siège du commissariat où sont détenus les protestataires. “Les policiers n'oseront pas tirer, parce qu'il y a des femmes et des enfants”, ont déclaré des femmes en colère. “Nous ne bougerons pas d'ici avant la libération de nos maris et de nos frères”, lancent-elles en guise d'avertissement à des membres du FLN. En effet, plusieurs incidents ont émaillé cette journée comme le lancement de projectiles sur le rassemblement des femmes. Des pierres ont même été lancées par “l'autre camp” contre les femmes dans le but de provoquer un début de panique. Sur le tas, on apprendra que des personnes appartenant au FLN tentaient de semer le désarroi parmi les manifestants exigeant la libération des leurs. Hier, en fin d'après-midi, des assurances ont été données aux femmes protestataires quant à la libération des détenus qui voulaient en découdre avec le premier responsable de la ville. Depuis sa désignation à la tête de la commune de Béthioua, le P/APC est au centre de “plusieurs scandales” liés essentiellement “à la corruption et au blocage du premier magistrat élu de la ville qui considère que la gestion de la municipalité relève exclusivement de sa personne”, lit-on dans un communiqué transmis à notre rédaction régionale à oran. B. G.