Le principal protagoniste dans cette affaire, Benyoucef Mellouk, a été refoulé, lundi, du palais d'El-Mouradia alors qu'il devait remettre au Président un dossier exhaustif sur l'affaire. De rebondissement en rebondissement, l'affaire des magistrats faussaires continue à alimenter l'actualité. Tout dernièrement, nous annoncions la convocation de Benyoucef Mellouk par la présidence de la République. En réponse à une lettre dans laquelle il faisait état de menaces contre lui et sa famille, cet ex-fonctionnaire de la chancellerie, qui avait au début des années 1990 révélé le scandale des faux moudjahidine, est invité au palais d'El-Mouradia. Dans le fax portant le sceau de la présidence, le chargé des affaires sociales lui demande de se munir des pièces du dossier. Une semaine après la réception du courrier, soit le 15 décembre, l'ancien directeur des affaires sociales et du contentieux du ministère de la Justice se rend à El-Mouradia. Il est reçu et prié de remettre ses documents à ses hôtes. Mellouk exige qu'on lui signe au préalable une décharge. Les représentants de Bouteflika refusent et la rencontre prend fin sur ce désaccord. Néanmoins, les fonctionnaires de la présidence se montrent rassurants et affirment à Mellouk que les portes du palais d'El-Mouradia lui seront toujours ouvertes. Enthousiasmé par l'information faisant mention de la prise en charge de l'affaire des faux moudjahidine par un proche conseiller de Bouteflika, général de son état, Mellouk se présente à nouveau à la présidence. C'était samedi dernier. Surprise, il est éconduit sans aucun justificatif. Que s'est-t-il passé ? “Je crains que les incriminés aient usé de pressions et négocié avec la présidence afin d'étouffer l'affaire”, suppose Mellouk. Il en veut pour preuve qu'il se trouve, une fois encore, l'objet de menaces et d'intimidations. “Ces derniers jours, mon téléphone ne s'est pas arrêté de sonner”, dénonce notre interlocuteur. Pendant plus de vingt ans, de l'époque où il avait découvert le pot aux roses, quelque 300 magistrats — dont de hautes personnalités de l'Etat, qui ont obtenu frauduleusement la fameuse attestation communale pour gravir les échelons de la magistrature — jusqu'à aujourd'hui, Mellouk vit l'enfer. Limogé de son poste, poursuivi par les tribunaux pour diffamation et divulgation de secrets, interdit de sortie du territoire national, harcelé, il ne sait plus à quel saint se vouer. Tout dernièrement, des anciens maquisards, dissidents de l'Organisation nationale des moudjahidine (ONM), qui ont à leur tour dénoncé la grande supercherie, ont révélé que la chape de plomb est enfin levée sur l'affaire. La présidence, d'après eux, mène l'enquête. Qu'est-ce qui explique alors le refoulement de Mellouk samedi dernier du palais d'El-Mouradia ? Veut-on le faire taire pour les besoins d'un marché conclu avec les plus renommés des faussaires ? S. L.