Exaspéré et conscient que le temps n'est plus en sa faveur, Bush somme les Irakiens de former rapidement leur gouvernement pour lui transmettre les clefs du pays à la dérive. Les leaders irakiens devaient se retrouver, à nouveau, hier dans l'après-midi autour du président Jalal Talabani pour essayer de départager le pouvoir de l'Irak post-Saddam. La réunion devait être consacrée à la poursuite de l'examen du Conseil de sécurité nationale, dont la création a été approuvée dans son principe. Cette institution, formée de 19 membres, est supposée réunir, outre les membres de la présidence, le Premier ministre et ses adjoints, le président du Parlement, les chefs des grands blocs parlementaires, c'est, en quelque sorte, une réplique miniaturisée de la carte irakienne. C'est pour cela qu'il y a mésentente sur ses prérogatives. Aux yeux des Américains, qui l'ont institué, le Conseil est conçu pour contrebalancer le pouvoir du Premier ministre, chiite, en vertu de la carte communautaire. Alors que pour le bloc chiite, majoritaire au Parlement, le Conseil devra rester consultatif comme le fonde la Constitution. Sunnites, Kurdes et laïcs de l'ancien Premier ministre, Iyad Allaoui, eux, sont plutôt du côté de la thèse américaine. Les Irakiens, qui multiplient rencontres après rencontres depuis les élections du 15 décembre 2005, auront ensuite à s'entendre sur le nom d'un Premier ministre, le candidat chiite Ibrahim Jaafari, qui veut se succéder à lui-même, étant toujours contesté par les sunnites. La répartition des portefeuilles ministériels sera la dernière des difficultés dans la course d'obstacles pour un gouvernement. En dépit des difficultés, le président Talabani, grand ordonnateur des tractations, se dit aujourd'hui optimisme ! Les Irakiens sentent, en effet, que le temps presse et que plus ils tardent à former leur gouvernement plus le pays s'enfonce dans la spirale de l'horreur, avec la menace d'une guerre intercommunautaire dont les prémisses se déclarent chaque jour. En outre, une importante délégation américaine est à Bagdad depuis le début de semaine pour faire état de l'impatience de Bush. L'opinion irakienne elle-même voit d'un mauvais œil ces tractations qui n'en finissent pas et dans les mosquées fusent des appels à former ce gouvernement d'union nationale pour faire face aux violences continuelles. La Ligue arabe, qui réunit son sommet à Khartoum, doit lancer un appel dans le même sens, ses dirigeants estimant que la mise en place d'un gouvernement irakien est le meilleur moyen de hâter le départ des troupes étrangères. L'Organisation de la conférence islamique (OCI) s'est également mêlée au concert des appels. D. Bouatta