Les prix proposés par les transformateurs de la tomate sont si bas que les agriculteurs ont décidé de diminuer les surfaces cultivées plutôt que de travailler à perte. Ainsi, les terres cultivées ont été réduites aussi bien à El Tarf qu'à Annaba, Skikda et Guelma. Pas moins de 100 000 emplois saisonniers ont été supprimés en deux ans seulement dans le secteur de la culture de la tomate industrielle dans la région de l'est du pays, englobant les wilayas de Annaba, El Tarf, Skikda et Guelma. Selon des cultivateurs rencontrés la semaine passée à la Chambre d'agriculture de Annaba, les prix proposés par les transformateurs de la tomate sont si bas qu'ils ont décidé de diminuer les surfaces cultivées plutôt que de travailler à perte. Les industriels, rappelons-le, arguaient des contraintes financières qui ont obligé un grand nombre d'entre eux à cesser leurs activités.Pour exemple, dans la wilaya d'El Tarf, qui, par le passé, produisait plus de 6 000 ha, les terres cultivées se réduisent à 600 ha aujourd'hui. Annaba ne compte plus qu'une production variant entre 120 et 150 ha. Jamais la production n'a été aussi faible depuis 1955, date de la création de la Tomacoop qui commercialisait la tomate pour tout le pays, sans parler de l'exportation vers l'Europe. Cette grave crise de la production de tomate, qui a connu son paroxysme il y a deux ans, lorsque les fellahs avaient fermé avec leurs tracteurs la route nationale menant vers l'aéroport, ne semble pas près de trouver une solution, selon ces derniers, qui pointent du doigt l'absence de l'Etat dans son rôle de régulateur de cet important créneau de l'économie nationale. “Nous sommes entièrement livrés à nous-mêmes, sans aucun appui, et nous devons faire face à toutes les facettes de cette activité avec des moyens très limités. Les structures qui géraient l'agriculture ont totalement disparu, au lieu de nous soutenir dans ce moment particulièrement difficile”, devait nous déclarer un agriculteur, qui a regretté les aides des offices, l'appui bancaire et technique dont bénéficiaient les gens qui travaillaient la terre par le passé. “Avant, il nous suffisait de travailler selon des programmes établis. Aujourd'hui, nous sommes seuls.” Cependant, il semble que les choses commencent à bouger du côté de la tutelle, selon le directeur de la Chambre d'agriculture, qui a révélé que la pression qui avait été exercée par les producteurs de tomate a eu pour résultat l'accord de principe donné par l'Etat de soutenir prochainement les cultivateurs de tomate à hauteur de 1,50 DA et les transformateurs de 1 DA par kg.Un geste jugé très insuffisant par les agriculteurs, qui ne demandent, pourtant, qu'à renverser la vapeur si leur tutelle leur accorde plus d'intérêt, d'autant plus que le produit national “est 100% bio, et capable de soutenir la concurrence au niveau mondial, par sa haute qualité”. Ces derniers se déclarent prêts à travailler main dans la main avec les transformateurs, si ces derniers se lançaient dans l'exportation au niveau méditerranéen dans une première étape. Mais pour ce faire, il leur faudrait l'appui des institutions concernées, et la cessation de l'importation de la tomate concentrée chinoise, notamment, qui inonde le marché, “alors qu'elle est loin d'avoir la qualité du produit national”. Une perspective qui serait à l'étude au niveau des responsables de la Chambre de l'agriculture, en parallèle avec la création d'associations de consommateurs favorisant le slogan “Consommons algérien”. Hafiza M.