Quels sont les centres d'intérêt de nos jeunes qui écument les cybercafés ? Quels sont les thèmes qui captent le plus l'attention de nos compatriotes comparativement aux cybernautes des autres pays ? Réponse sur Google, le moteur de recherche le plus puissant du monde. En consultant Google Trends, un service du géant américain Google, plus grand moteur de recherche sur le Web avec plus de 8 milliards de pages explorées, on apprend beaucoup sur la fréquence des mots-clés qui reviennent le plus dans la case “search” et, par ricochet, les champs thématiques récurrents qui captent l'intérêt des internautes. Google Trends est un outil mis en place spécialement, en effet, pour analyser le “trafic” des mots-clés sur la toile avec, à la clé, une base de données sur la fréquence des requêtes émises par les internautes. Les données sont disponibles par ville, par pays ou par langue. Elles peuvent porter sur une période d'un mois, d'une année ou de plusieurs années. Les résultats sont fournis sans forme de “top-ten” des meilleurs scores. Toutefois, seule une bande bleue assortie d'un graphe renseigne sur le volume des consultations et les “tendances” sur tel ou tel thème. Il n'y a pas de données statistiques chiffrées. Pas de pourcentage. Les résultats ne permettent donc pas une analyse poussée du matériau récolté. Pour autant, ils n'en fournissent pas moins des indices tangibles sur la “carte des intentions” à un temps T, en signalant l'évolution de l'intérêt porté à un sujet donné sur une période donnée. Si nous devions appliquer ce “dispositif de curiosité” de nos “compatrinautes” en passant en revue un panel de mots-clés, le résultat serait sans doute fort édifiant quant aux centres de préoccupation actuels de nos accros du Net. “Rencontre”, “Amour”, “Ben Laden”… Commençons par un mot comme “rencontre” tant il est vrai que le domaine relationnel et particulièrement affectif focalise l'attention de la majorité de nos jeunes. Les résultats fournis par Google Trends (voir google.com/trends) donnent l'Algérie à la deuxième position après la Côte d'Ivoire et devant respectivement la Tunisie, le Maroc, la France et la Belgique. Toujours dans l'“affectif”, en tapant le mot “amour”, il ressort que les Marocains sont les plus friands de “cyber-romances”, talonnés de près par les Algériens (moins fleur bleue ?) et les Tunisiens. Les Français et les Belges arrivent nettement derrière. Est-ce à dire que les Maghrébins manquent à ce point d'amour ? Qu'ils ont un terrible déficit affectif en partage (à défaut d'avoir l'UMA au cœur) ? C'est une lecture. Un autre mot, largement moins romantique celui-là : Ben Laden. Résultat de la recherche : l'Algérie arrive en tête des requêtes, collée par le Maroc, la Tunisie et le Sénégal. La France arrive en 5e position avec un passable degré de curiosité. Toutefois, il faudrait dans un cas comme celui-ci tenir compte de l'orthographe. De fait, lorsque l'on écrit “Bin Laden” selon l'orthographe british, le résultat est tout autre. Et, le cas échéant, c'est la Norvège qui montre le plus d'engagement, suivie de l'Argentine. Les Etats-Unis, pourtant très obsédés par le chef d'Al-Qaïda depuis les attentats du 11 septembre, ne sont qu'à la troisième position. Peut-être les Américains préfèrent-ils recourir à d'autres bases de données pour se renseigner sur leur bête noire. Il y a également les Australiens qui s'intéressent de près au sujet. L'Inde aussi y manifeste un vif intérêt au vu de sa position frontalière avec le Pakistan. Il faut croire que l'“émir planétaire” intrigue l'humanité toute entière depuis qu'il s'est fondu dans la nature (du côté du Ouazaristan, selon Mohamed Sifaoui), se muant quasiment en “émir virtuel”. Search : terrorism Un mot “voisin” : terrorisme. Les scores de consultations pour l'année en cours donnent le Maroc à la première place. L'Algérie, elle, est à la seconde position, une manière peut-être de suggérer que la page commence à être tournée. En appliquant l'orthographe anglaise (terrorism), cela nous donne par ordre d'intérêt décroissant : le Pakistan, les Philippines, Singapour, l'Inde, l'Australie, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la Suède, le Canada et les Pays-Bas. Il ressort donc clairement que l'intérêt porté au sujet domine plutôt les zones vers lesquelles le terrorisme international s'est déplacé depuis l'apparition de la nébuleuse Al-Qaïda, avec, à la clé, quelques coups spectaculaires comme la vague d'attentats de l'année dernière. Sous “GSPC”, l'Algérie n'est pas à la première place comme on pourrait s'y attendre. Elle se trouve devancée par la Grande-Bretagne sans doute en raison de l'impact psychologique des attentats de Londres et l'affiliation présumée du GSPC à Al-Qaïda. Le mot “islam” domine, lui, dans les cybers asiatiques : Indonésie, Malaisie, Pakistan. Les Algériens sont 4e devant l'Egypte et les Emirats arabes unis. L'Arabie Saoudite, exportateur “historique” de l'islam wahhabite, occupe le bas du tableau derrière la Turquie et… la Norvège, seul pays occidental à s'intéresser au sujet certainement suite à l'affaire des caricatures. Les cyber-harragas boudent le visa Autre mot qui a disparu du Web en dépit d'une présence forte dans le champ lexical national : le mot “visa”. Les cyber-harragas seraient-ils échaudés par les tracasseries en vigueur ou bien faut-il penser qu'ils sont plutôt adoucis par une Algérie qui se porterait mieux ? Mystère. Le nom de “Zidane” suscite une grande attention, surtout depuis que le patron des Bleus a annoncé sa retraite. Mais ce sont paradoxalement deux pays africains, le Sénégal et la Côte d'Ivoire, qui sont le plus à l'affût de ses nouvelles. Les Algériens, eux, arrivent à la 3e place. Les Français ne sont qu'à la 5e position, avec, de surcroît, un niveau de “curiosité” assez bas pour leur idole sortante. Tapons maintenant “droits de l'homme”. Les pays du Maghreb occupent sous ce chapitre (curieusement) le haut du podium (dans l'ordre : la Tunisie, l'Algérie et le Maroc). Bouteflika, lui, n'est “recherché” qu'en Algérie (grosse bande bleue à l'appui). On retiendra qu'un pic d'intérêt à l'endroit de notre raïs a été enregistré un certain 17 décembre 2005, date qui coïncidait avec la publication du premier communiqué du professeur Zitouni rassurant les Algériens sur l'état de santé de leur Président, hospitalisé depuis le 26 novembre au Val-de-Grâce. Mariage.com Revenons au thème préféré des internautes : l'amour. Son corollaire ? Le “tchat”, la voie royale vers l'âme sœur (ou l'âme frère). Sous cette rubrique, les plus gros tchateurs, détrompez-vous, sont les Tunisiens (alors que le pays de Ben Ali n'est pas réputé pour être un paradis de la cyberculture). Les Algériens arrivent en seconde position, eux qui sont des visiteurs assidus des sites de discussions. Après, il y a les Français, les Marocains et les Belges. Autre mot vraiment “clé” : Mariage. Là, les Algériens caracolent carrément en tête du classement devant les Marocains, les Français, les Belges et les Suisses. Les habitués du Net ont certainement dû le remarquer : les célibataires ont effectivement de plus en plus recours au Web pour passer des annonces matrimoniales. Dernier sujet à forte saveur ajoutée : le sexe. Les cybernautes DZ occupent en la matière la première place devant le Maroc. Les Algériens trouveront dans le Net un “défouloir” insoupçonné pour faire exploser tous les tabous et donner corps à leurs fantasmes les plus inavouables… Mustapha Benfodil