Le drame de jeudi dernier fait partie de ceux dont nous nous croyions protégés, parce que, nonobstant toutes les carences de la compagnie nationale, il était incontestable que le niveau de sécurité des avions d'Air Algérie la distinguait parmi les pavillons de son secteur. Qu'importe que cela tienne de la qualité de maintenance de sa flotte, de la prévoyance de sa gestion technique ou de la valeur de son personnel naviguant. Il y a certainement de tout cela. Il est probable que cette fois-ci, il y eut faute. Et déjà quelques éléments rendus publics plaident pour l'erreur humaine qui aurait rendu fatale la panne technique, en prenant le risque de faire décoller un avion sans tenir compte de la menace mécanique. Les familles des victimes ont le droit de savoir. La lumière doit être faite sur les causes qui sont à l'origine du décès de leurs proches. Les responsabilités, s'il y en a, doivent être identifiées et reconnues. Le deuil de plus d'une centaine de famille l'exige. Mais au moment de crier vérité et justice, il ne faudrait pas oublier que dans le lot de tragédie, il y a, parmi les victimes, des personnels d'Air Algérie, de ceux-là dont nous évoquions plus haut les qualifications et le sérieux qui sont peut-être à l'origine de la fierté et de la confiance dont jouissait jusqu'ici Air Algérie, malgré les vicissitudes légendaires de ses programmations. Ce personnel a aussi droit aux sympathies au moment où il pleure ses collègues. Il n'a pas à être confondu avec l'entreprise qui, au demeurant, est représentative de ces lourdes institutions économiques qui maintiennent en vie, en pleine mondialisation, une gestion de soviets, un management irrationnel, éculé. Quand il faut endurer un jour d'eau dans les robinets ou quelques soirées nationales sans électricité, cette forme archaïque et cependant rentière de gestion a l'apparence moins catastrophique, mais quand il y va de la vie de dizaines d'hommes, l'indolence des préposées institutions d'Etat apparaît, parfois, pour ce qu'elle est, une irresponsable insouciance qui mène à l'irréparable. Mais comme il n'est point permis de préjuger dans tel cas, autant penser à la peine des uns et des autres. Celle des parents de passagers, celle des parents des membres de l'équipage. Et comme par une ironie des circonstances, c'est la veille du 8 Mars, une des deux pilotes féminins qu'Air Algérie et la corporation des aviateurs ont perdu dans la catastrophe. M. H.