Sachant son départ proche, le secrétaire général de l'ONU ne se retient plus pour livrer sa véritable pensée sur la situation en Irak, quitte à provoquer la colère de George Bush, qui ne veut pas entendre parler d'une guerre civile dans ce pays. Emboîtant le pas à certains médias américains, Kofi Annan a balancé, dimanche après-midi, un pavé dans la mare au sujet de la situation prévalant en Irak depuis l'invasion armée des forces de la coalition, sous commandement américain, en mars 2003. “Etant donné le niveau de violence, le nombre de personnes tuées, l'amertume et la façon dont les forces s'organisent les unes contre les autres, il y a quelques années, lorsque nous avons eu le conflit au Liban et ailleurs, nous qualifions cela de guerre civile”, a expliqué le secrétaire général des Nations unies. En Irak, “c'est encore pire”, a-t-il clairement affirmé. Poursuivant son raisonnement, Annan précisera que la situation est “extrêmement dangereuse” dans ce pays. Partant de ce constat, le premier responsable de l'ONU ajoutera : “Je pense que nous avons tous intérêt à remettre l'Irak en état et nous voudrions le remettre en état, mais les Irakiens vont devoir s'unir et faire que cela se produise.” Quant à la question de savoir si les Irakiens pourront s'en sortir seuls, le SG de l'ONU clamera : “Bien sûr, ils vont avoir besoin d'aide (...) je ne suis pas sûr qu'ils puissent le faire seuls.” Il donne raison aux Irakiens, qui ont le sentiment que la situation a empiré depuis la chute de la dictature de Saddam Hussein en 2003. “Si j'étais un Irakien moyen, évidemment je ferais la même comparaison, ils avaient un dictateur qui était brutal mais ils avaient leurs rues, ils pouvaient sortir, leurs enfants pouvaient aller à l'école et revenir à la maison sans que leur mère et leur père ne s'inquiètent”, dira-t-il. Dans la foulée, il ne ménagera guère le gouvernement irakien en affirmant qu'il “n'a pas été capable de contrôler la violence. La société a besoin de sécurité et d'un environnement sûr”. Et de poursuivre : “Sans sécurité, on ne peut faire grand-chose, pas de redressement ou de reconstruction.” Dans cet entretien accordé à la chaîne de télévision britannique BBC, Kofi Annan qualifiera la situation au Moyen-Orient de “très inquiétante”, tout en assurant qu'il n'y avait pas “de liens entre les crises au Liban, en Palestine, en Irak et en Afghanistan”. Le secrétaire général de l'ONU indiquera : “Nous devons également regarder ces pays comme un ensemble, pas comme des conflits isolés.” Il ne manquera pas d'évoquer sa “grande inquiétude concernant l'ensemble de la région du Moyen-Orient”. “Je ne pense pas que le Moyen-Orient puisse supporter une crise supplémentaire” car “la région est actuellement dans un état très précaire et très délicat et j'ai indiqué assez clairement que sur le problème iranien, nous devons faire tout ce qui est possible pour parvenir à une solution négociée. Pour moi, c'est la seule solution”, expliquera Kofi Annan. Pour conclure, il affirmera qu'une intervention militaire “serait extrêmement imprudente”. K. ABDELKAMEL