Réputé pro-occidental, le fils cadet du leader de la révolution libyenne éprouve toutes les peines du monde à venir à bout des conservateurs, menés par le vice-président du Parlement, Ahmed Ibrahim, pour imposer ses réformes. La récente arrestation de l'opposant Idris Mohammed Boufayed, un médecin qui a vécu en Suisse pendant seize ans, confirme, selon les analystes, la guerre entre les partisans de Seïf el-Islam Kadhafi et les conservateurs. De retour en Libye, le 5 novembre dernier après un long exil pour relancer le parti d'opposition l'Union nationale pour la réforme, qu'il avait fondé il y a 18 mois, Boufayed a été convoqué à l'agence locale de sécurité à Tripoli, avant d'être écroué. Cet événement a remis au goût du jour la bataille que se livrent, depuis la fin de l'année 2003, les réformateurs et les conservateurs. Cette guéguerre a commencé après que Tripoli eut renoncé à son programme nucléaire d'armes de destruction massive. Pour saborder le rapprochement avec Washington, Ahmed Ibrahim, le numéro deux du Congrès du peuple libyen (parlement) avait alors tiré à boulets rouges sur l'administration Bush. Selon le président de la Ligue libyenne des droits de l'homme, Slimane Bouchoughir, Seïf el-Islam Kadhafi, qui “n'ambitionne pas de révolutionner le régime, mais s'oppose seulement à la corruption et la bureaucratie et l'absence d'activité”, rencontre une vive résistance de la part des caciques du système. La même source, citée par le journal londonien Al-quds, estime que “des éléments faisant partie de la base du régime, composés d'anciens révolutionnaires, qui se sont transformés en rassembleurs de la révolution, constituent désormais un groupe de pression opposé à toute sorte de réforme dans le pays”. Dans la foulée, Bouchoughir ajoute : “En Libye, nous sommes tous des détenus. Tu es toujours l'otage de l'élite au pouvoir et tu n'as aucun droit.” Ceci étant, tous les efforts déployés par Seïf el-Islam Kadhafi, que l'on annonce comme le successeur de son père, pour assurer aux opposants exilés le droit du retour, sont voués à l'échec jusqu'à maintenant, comme l'indique l'exemple du Dr Idris Mohamed Boufayed. Toutes ses critiques et ses appels pour passer du stade de la “révolution à celui de l'Etat”, à travers une constitution pour le pays, n'ont ébranlé les conservateurs. En réaction à son initiative de créer une chaîne de médias audiovisuels et écrits pour promouvoir ses idées réformatrices, ses opposants s'apprêtent à lancer au Caire une chaîne de radio d'une orientation nationaliste arabe. C'est dire que sa mission ne s'annonce guère facile. K. ABDELKAMEL