La nécessité d'associer les entrepreneurs à la mise au point de la stratégie industrielle devient d'une brûlante actualité dans un contexte où l'appareil de production connaît de sérieuses difficultés face à la concurrence. Les organisations patronales regrettent l'absence de concertation avec le gouvernement concernant l'élaboration de la stratégie de développement industrielle. Invité par le forum du quotidien El Moudjahid, le patronat, unanime, affirme n'avoir pas eu accès au document. “Personne ne nous a consultés”, précise la vice-présidente de la CAP. Le document censé donner plus de visibilité aux opérateurs économiques projette une image floue sur les intentions du gouvernement. Pourtant, le ministre des Participations et de la Promotion de l'investissement avait à maintes reprises expliqué qu'il s'agit, grâce à cette stratégie, d'avoir une plus grande visibilité et d'être au rendez-vous de l'efficacité et de la diversification de l'économie. Précisément, le document identifie les secteurs où l'Algérie présente des avantages comparatifs face à la concurrence. Ces branches seront soutenues par l'Etat en vue de les rendre plus compétitives. Cette stratégie industrielle a pour objectif l'intégration au marché régional et mondial comme élément central en matière de choix stratégique et qui serait axée sur la promotion des produits primaires et ceux à forte valeur ajoutée, la sauvegarde des capacités nationales de substitution à l'importation. Le gouvernement est très avancé dans l'examen des différents volets qui structurent la nouvelle politique de développement industrielle en Algérie. C'est cette démarche que les organisations patronales, notamment celles qui ont signé le pacte national économique et social, contestent. “Nous ne sommes pas là rien que pour signer les documents une fois adoptés. Nous aurions aimé être associés en amont”, souligne le responsable de CIPA. Mais pour le vice-président du Forum des chefs d'entreprise, M. Hamiani, c'est tout le mode de concertation actuel qu'il faut revoir. Les tripartites, selon lui, ne sont que des “shows médiatiques”. Ce qu'il appelle de ses vœux, c'est une concertation régulière, permanente sur tous les sujets qui touchent à l'entreprise. Des voix se sont même élevées pour suggérer la nécessité de mettre en place un ministère de l'économie qui regrouperait les finances, l'industrie, la PME et le commerce. Les intervenants ne remettent pas en cause le principe d'élaboration de la stratégie de développement industrielle, une attente d'ailleurs exprimée et souhaitée fortement et à maintes reprises par les opérateurs économiques, publics et privés. Et puis la réalité statistique est là pour témoigner de l'urgence de cette politique de développement industrielle. L'Algérie s'enfonce de plus en plus dans une économie pétrolière. L'industrie manufacturière qui participait à hauteur de 18% à la formation du produit intérieur brut en 2000 ne représente aujourd'hui que 6,8%. Du coup, certains parlent de désindustrialisation rampante. Des entreprises perdent de plus en plus des parts de marché local et celles qui exportent ne sont pas nombreuses. Hamiani ajoute la mauvaise qualité de la croissance, non endogène, reposant trop sur les dépenses publiques et qui profite aux entreprises étrangères. Le gouvernement lui-même est conscient, peut-être avec quelques années de retard, de cette triste réalité. Il y a donc consensus sur le fond. C'est dans la forme que les différents acteurs, gouvernement et patronat, divergent. Les patrons estiment que si les politiques macroéconomiques pouvaient être élaborées en haut de la pyramide par le gouvernement, ou les experts du gouvernement, dans le détail il faut impliquer l'entreprise. C'est elle qui, au bout du processus, est appelée à porter les réformes économiques et c'est elle qui les subira. En tout état de cause, le ministre des Participations et de la promotion de l'investissement a annoncé l'organisation des assises de l'industrie une fois toute la stratégie examinée et adoptée par le gouvernement. Mais une fois le document adopté, sera-t-il enrichi et amendé ? Sinon, à quoi serviraient les assises annoncées ? Meziane rabhi