Le libre exercice du métier de journaliste est intimement lié à l'indépendance de l'appareil judiciaire. Voilà en somme l'idée-force qui s'est dégagée de la première journée d'un séminaire de trois jours sur le journalisme dans le monde arabo-musulman, qui se tient depuis hier au siège de la Fondation Friedrich-Ebert à Alger. Placée sous le générique “Journalisme : de la perspective locale à la dimension globale, coopération régionale avec/dans le monde arabe et en Iran” et organisée par le Syndicat national des journalistes (SNJ), la Fédération internationale des journalistes (FIJ), la Fondation Friedrich-Ebert et l'organisme danois International média support, cette rencontre a enregistré la participation de plusieurs représentants d'organisations syndicales des pays arabes (Algérie, Tunisie, Maroc, Bahreïn, Jordanie, Irak Palestine…) et de pays européens (Royaume-Uni, Belgique, Irlande…), d'un représentant du Bureau international du travail, du vice-secrétaire général de la Fédération arabe des journalistes (FAJ), Mahmoud El-Bosifi, et de Aidan White, secrétaire général de la Fédération internationale des journalistes (FIJ). Dans son intervention, ce dernier a livré un aperçu sur les activités entreprises par son organisation et basées sur la solidarité dans les situations de crise. Il a indiqué qu'à l'occasion du prochain congrès de la FIJ prévu en mai, un accent particulier sera mis sur la situation dans le monde arabe et le Moyen-Orient ainsi que sur la question de la sécurité des journalistes. Sans conteste, le clou de la journée d'hier a été la communication de Me Bourayou sur la dépénalisation du délit de presse. Tout en procédant à une analyse comparative de l'exercice de la profession dans les pays de l'hémisphère sud, Me Bourayou a passé sous sa loupe la situation de la presse algérienne. Pour lui, la loi 90/07 relative à l'information est assez permissive en ce sens qu'elle reconnaît au journaliste le droit de préserver ses sources. Un droit qui est loin d'être consacré en France même. Le virage du durcissement de la répression a été pris en 2001 avec l'adoption du fameux code pénal. À ses yeux, il y a lieu de trouver un équilibre entre la dépénalisation du délit de presse et la responsabilité du journaliste. “La dépénalisation du délit de presse ne veut nullement dire que le journaliste est au-dessus de la loi”, explique-t-il. Et d'ajouter : “Pour dépénaliser, il faut d'abord songer à modifier l'ensemble du cadre normatif. Nous souffrons d'un cadre hétérogène et contradictoire. Il faut reformer l'appareil judiciaire pour le mettre à l'abri de toute interférence politique. La loi doit garantir au journaliste le droit de s'intéresser au fonctionnement de l'administration. Ceci dit, il faut aussi asseoir un contrôle à l'intérieur des entreprises de presse et renforcer le rôle du Conseil de l'éthique et de la déontologie.” Après avoir déploré un déficit en matière de représentation au sein de la corporation, Me Bourayou estime que les avancées et les conquêtes enregistrées par les professionnels des médias n'ont pas été suivies de textes. “Nous avons les textes les plus rétrogrades”, s'est-il offusqué. Un avis que ne semble pas partager Aidan White qui pense qu'“il ne suffit pas d'avoir de bons textes” préférant poser la problématique de leur “application”. Mais conseil est donné à privilégier le dialogue avec les autorités. Il compte rencontrer aujourd'hui Hachemi Djiar, ministre de la Communication. Pour sa part, M. El-Bosifi a posé la problématique de l'analphabétisme, estimant que le droit à l'information dans les pays arabes se heurte à ce problème dont le taux est de 65%. A. C.