Dans cet entretien, accordé à Liberté, le président de la Fédération algérienne de judo, Mohamed Meridja, annonce qu'il ne sera pas candidat à sa propre succession en 2008, soit à la fin du mandat. Il estime que seize ans à la tête de la FAJ, ça suffit, avant de laisser la place à d'autres compétences. Liberté : M. Meridja, lors des derniers jeux Olympiques d'Athènes en 2004, vous nous avez confié, dans ces mêmes colonnes, que si la Fédération de judo possédait le tiers de ce qu'avaient les Français comme moyens, l'Algérie aurait plusieurs champions du monde. Pensez-vous qu'aujourd'hui le judo algérien a bénéficié de davantage de moyens infrastructurels de la part des pouvoirs publics ? Mohamed Meridja : Je pense que trois ans après les jeux Olympiques d'Athènes, la Fédération algérienne de judo possède davantage de moyens, à commencer par le dojo (salle spéciale pour le judo) national que le ministère de la Jeunesse et des Sports a mis à notre disposition. Cette salle, située à Bouzaréah, est réservée à la préparation des athlètes de l'équipe nationale et aux judokas de la région d'Alger, soit un minimum de 250 athlètes qui s'y entraînent dans des conditions avantageuses. Cela traduit en fait une volonté du ministère de tutelle d'apporter toute l'aide à cette discipline très prisée et génératrice de grandes potentialités en Algérie. Du reste, la subvention allouée à la Fédération de judo a quasiment triplé ces trois dernières années. Cette assistance accrue du MJS a permis, aujourd'hui, d'avoir un athlète qui est vice-champion du monde et un autre, troisième au classement lors du Mondial du Caire. Vous n'êtes pas non plus sans savoir que la sélection algérienne s'est classée troisième au classement par équipes. Ceci dit, ce n'est pas pour autant qu'il faut verser dans l'autosatisfaction, que ce soit au niveau des résultats ou des moyens que mettent à notre disposition les pouvoirs publics. En fait, pour arriver à hisser encore plus haut le niveau du judo en Algérie, il faut que tout le monde s'implique, notamment les DJS et les collectivités locales qui doivent apporter toute l'aide nécessaire aux clubs. Nous avons des clubs qui activent un peu partout dans le pays et qui forment des talents prometteurs qui ne demandent qu'à être encouragés. Un club drainant au minimum 200 athlètes ne peut raisonnablement fonctionner avec une subvention de 50 millions de centimes. Alors, pour avoir des titres mondiaux et se maintenir à un rang supérieur, car le plus difficile est de garder le cap, il faut se donner les moyens de sa politique. Justement, en dehors de ce dojo national, comment évaluez-vous les capacités infrastructurelles de la discipline en Algérie ? Par rapport à la demande que suscite la pratique du judo en Algérie, notamment après les derniers championnats d'Afrique qui ont connu une médiatisation particulière, ce qui n'est pas toujours le cas, je dirai que les infrastructures ne suffisent pas. Beaucoup de jeunes veulent venir vers le judo mais ils ne trouvent pas de clubs ou d'associations preneurs. En outre, nous souffrons de la vétusté de certaines salles construites depuis longtemps et qui ont besoin d'être rénovées. Les collectivités ont réfléchi à construire des salles de sport où vous avez plusieurs disciplines qui s'alternent pendant la semaine. Or, la pratique du judo, pour porter ses fruits, doit être continue pendant toute la semaine. C'est une méthode d'entraînement spécifique qui requiert des salles spéciales. Ce n'est pas la même chose pour le karaté, la boxe ou un autre sport. En fait, dans ce genre de salles, un peu fourre-tout, aucun sport n'est bien servi. Ce sont des infrastructures juste bonnes pour le sport de masse et qui n'ont rien à voir avec les exigences de haut niveau. Pourtant, le judo est prisé en Algérie, n'est-ce pas ? Effectivement, d'ailleurs, il n'y a pas une famille où vous ne trouvez pas une personne ou deux qui pratiquent ou ont pratiqué le judo. La majorité des jeunes ont au moins essayé de faire du judo. Actuellement, la fédération a dénombré 150 000 licenciés dont 60 000 pour la capitale. Le plus petit club en Algérie a au moins 200 pratiquants. C'est un vivier important qui peut nous valoir des satisfactions à un niveau très haut pourvu que les moyens suivent. Il faut savoir que le tempérament de l'Algérien est prédisposé aux sports de combat. Nos enfants se disputent beaucoup dehors ou pendant les récréations. Il faut donc savoir canaliser toute cette force. Pour notre part, nous avons décidé au niveau de la fédération de créer une commission spéciale pour prendre en charge les enfants de 4 ans jusqu'à l'âge de 18 ans. Il existe un programme détaillé à ce propos. M. Meridja, quels sont, selon vous, actuellement les meilleurs espoirs du judo en Algérie ? Tout d'abord, je tiens à préciser que l'Algérie est un vivier de talents dans cette discipline et, à titre d'exemple, récemment lors d'un tournoi international, nous avons engagé un athlète qui a été classé troisième au championnat d'Algérie. Ce dernier a brillé de mille feux en remportant tous ses combats. C'est là un exemple qui se répète chaque année. Tout cela pour dire que la relève existe. Du reste, la stabilité des résultats au sein de la sélection nationale est la meilleure preuve du travail accompli. Sur le plan africain, l'Algérie domine les compétitions depuis au moins cinq ans. Pourtant, des pays comme l'Egypte, la Tunisie, le Sénégal… possèdent également des talents sûrs. Pour ce faire, et afin de garder le leadership, il faut savoir que l'EN est prise en charge pendant toute l'année en ce sens que les athlètes sont constamment en stages bloqués ou en demi-pension. Nos athlètes participent aussi à des tournois à l'étranger de haut niveau, regroupant de potentiels champions du monde suivant un programme de préparation. Quel est l'objectif de la fédération pour les prochains jeux Africains d'Alger ? Notre objectif principal est de remporter 7 médailles d'or. Cependant, si je prends comme référence les derniers jeux Africains où nous avons remporté 9 médailles d'or sur les 14 remportées, soit un record, je dirai que nous pouvons aspirer à mieux. Et en dehors des jeux Africains ? Ensuite, nous avons les jeux Afro-asiatiques à Alger et les championnats du monde au Brésil en octobre 2007. Quelle est la position de votre fédération par rapport au décret 05-405 ? Pour nous, il s'agit d'une loi de la République que nous avons, du reste, appliquée sans aucun problème. Nous avons donc procédé, il y a quatre mois de cela, à la mise en conformité des statuts de la fédération avec le décret 05-405. Le fait que cette loi stipule que le président n'a pas le droit de se présenter à sa propre succession ne vous incommode pas quelque part ? Ecoutez, mon point de vue à ce propos est clair. Je ne pense pas qu'un seul mandat suffit pour un président élu pour mener à bien son plan de développement. C'est mon avis. Et puis, pour pouvoir placer des responsables au niveau des instances internationales, il faut qu'ils fassent d'abord leurs preuves sur le plan local et cela demande plus d'un mandat. C'est une loi qui vous pousse un peu à la porte puisque, selon les statuts, vous ne pouvez pas vous présenter à la fin de votre mandat en 2008… Bien avant le décret 05-405, j'avais décidé de quitter la présidence de la fédération de judo car je pense qu'après quatre mandats, il est temps de laisser la place à d'autres compétences et, Dieu seul sait qu'il en existe. Ma décision de me retirer en 2008 est mûrement réfléchie. Elle est mue par des raisons strictement familiales. Elle n'a donc rien à voir avec le décret 05-405. S. B