Le nouveau gouvernement est connu. Il ressemble, à s'y méprendre, à l'ancien. S'il n'y avait pas les procédures constitutionnelles auxquelles il fallait sacrifier, même si c'est en tordant un peu le cou aux règles de délai et de synchronie, on se serait aperçu que le pays vient de passer une nouvelle échéance politique. Car, enfin, l'Assemblée nationale n'a pas changé non plus. Les “petits” partis, qui sont nombreux à s'être infiltrés dans l'hémicycle, diluant dans une petite mesure, la majorité coalisée, ont été dénoncés par les “grands”. Ils ont, d'ailleurs, promis de réviser la Constitution pour prévenir désormais ce genre d'effractions. Et si la représentation n'a pas tellement évolué, pourquoi l'Exécutif devrait-il se renouveler, en effet ? Ce qui a changé, c'est le regard des citoyens sur les élections. Sur la politique. Mais là est une autre question. Le pouvoir n'y pas répondu, justement parce qu'il n'a pas vu dans l'écrasante abstention des électeurs autre chose que l'expression d'un désenchantement envers “la classe politique”. La classe politique étant seule sommée d'évoluer, le pouvoir ne se sent pas interpellé par les deux tiers d'électeurs qui ont boudé le bureau de vote. La question de confiance ne se pose pas pour un gouvernement qui, pour représenter en partie la majorité parlementaire, est chargé de mettre en œuvre le programme du Président. Or, en deux sorties sur le terrain, le chef de l'Etat a pu vérifier et rappeler sa popularité. Le principal enseignement que l'on peut tirer de ces nominations qui, globalement, correspondent à une reconduite de l'ancienne équipe est que l'équipe en place est reconduite parce qu'en principe, elle mène correctement la mise en œuvre du programme présidentiel. À quelques exceptions près. Ces exceptions, si elles se confirment, ont leur importance, puisqu'il s'agit d'engagements présidentiels prioritaires. C'est notamment le cas dans le secteur de l'habitat. Par devoir de conformité, une république se doit de se doter d'une instance législative renouvelable. Elle constitue une étape obligatoire dans la décision démocratique. Réduite à sa plus simple expression, l'institution parlementaire remplit ce rôle par son existence même. Si, de plus, le peuple ne lui concède qu'une incomplète légitimité, il n'est pas étonnant que la composition de l'Exécutif ne dépende pas tout à fait des changements, encore une fois minimes, connue par la composante politique de l'APN. En définitive, l'événement est, en quelque sorte, dans le non-événement : les élections du 17 mai ont été l'occasion de confirmer la continuité. Et tous les cafouillages relevés par l'opinion proviennent de cette espèce de paradoxe. Que changer quand — comme le montre la reconduction du gouvernement — il n'y a rien à changer ? Ou — comme le montre le taux d'abstention — quand tout est à changer ? M. H. [email protected]