De nombreux indices tendent à faire croire à l'imminence d'un retour à la normale. Les trabendistes le pressentent fort. Considéré comme le poumon économique de la ville d'Oran, le marché de M'dina J'dida, alimenté principalement par une marchandise en provenance du Maroc, mais aussi de la Syrie et de la Turquie, continue de fonctionner normalement, même après l'annonce, il y a 9 ans par les autorités de Rabat, d'établir le visa obligatoire d'entrée au Maroc. Cependant, un brusque regain de vitalité dont font preuve des commerçants installés à M'dina J'dida n'aurait pu avoir lieu sans la “certitude” d'une prochaine reprise, induite par des brusques opérations de change parallèle. Pour expliquer cette frénésie peu coutumière, le responsable de cette agence de tourisme relate la volonté des autorités locales de redynamiser les secteurs commercial et touristique, avec l'instauration de nouveaux modes de travail à la faveur d'une “éventuelle réouverture des frontières algéro-marocaines”. Houari, commerçant, pense qu'il ne faut pas “tomber dans les erreurs du passé. Un autre commerçant ambulant, plus âgé, ne semble pas inquiété outre mesure par les “rumeurs persistantes” qui circulent çà et là. Selon lui, “pour ceux qui ont des milliards, les frontières n'existent pas. Une éventuelle mesure de réouverture des frontières sera bénéfique aux chômeurs, comme moi. Le “trabendo” permet à des milliers de jeunes de gagner décemment leur vie ; sans cela, la ville sombrera dans un chaos indescriptible. Depuis que le gouvernement marocain a décidé unilatéralement, en août 1994, l'instauration du visa pour tous les visiteurs de nationalité algérienne, l'image du cambiste marocain écrasant, entre sa sandale et ses orteils, mille dinars algériens pour délivrer en retour cent dirhams est malheureusement trop forte pour qu'on ne conclue pas que certains Algériens ont perdu tout sens de dignité et tout amour propre. A côté de ces extrêmes, il a été constaté que beaucoup de mesures ont été prises dans l'éventualité d'une “nouvelle reprise”. Parmi celles-ci, l'interdiction faite aux taxis d'aller au-delà des frontières dans un but professionnel. Ce déplacement sera strictement réglementé et le nombre de passagers, empruntant ce mode de transport, sera diminué en conséquence. Selon un responsable des douanes à Oran, “cette disposition facilitera beaucoup la tâche des douaniers dans les opérations de fouilles des bagages. Nous procéderons également à l'enregistrement systématique aux bureaux de douane de toutes les quittances de sortie, ce qui conférera au contrôle des sorties un cachet d'efficacité et de maîtrise”. Un patron d'un atelier de confection ne mâche pas ses mots : “C'est le laxisme des pouvoirs publics et les complicités qu'il induit qui ont fait qu'indirectement, c'est l'Algérie qui nourrissait une partie du Maroc”. Pour faire face à une nouvelle situation “incontrôlable” dans l'éventualité de la réouverture des frontières terrestres, les services des douanes prendront des mesures énergiques, susceptibles de renforcer les dispositifs de lutte contre la contrebande et plus particulièrement l'exportation illégale des produits de consommation toujours prisés à Souk D'zaïr à Oujda. Enfin, si à M'dina J'dida les “rumeurs persistantes” demeurent l'objet de discussions de certains commerçants, les habitants, eux, sont plutôt regardants ces jours-ci sur les évènements tragiques qui secouent l'Irak... B. G.