Alors que la situation paraît sans issue dans les territoires palestiniens, où la sédition de Hamas est consommée, Israël, comme à l'accoutumée, n'a pas raté l'occasion de jeter de l'huile sur le feu. Son parti pris en faveur de l'Autorité palestinienne sent trop la manœuvre. Les autorités israéliennes, qui, jusqu'ici, ont tout fait pour affaiblir le président palestinien en l'acculant de concessions en concessions, découvrent subitement des vertus au Fatah, le parti historique de la cause palestinienne, qu'elles avaient étouffées tout en favorisant la naissance et la promotion de l'islamisme politique à Gaza et même en Cisjordanie. Hamas n'aurait jamais connu une telle popularité sans le coup de pouce d'Israël. Aujourd'hui, retournement de situation, Gaza se transforme en “Hamas land” et ses populations, ne sachant plus où donner de la tête, s'entassent aux frontières avec Israël (!), pour fuir les violences à venir. Menacée d'isolement total, l'enclave du Hamas va connaître de sérieuses difficultés, autrement plus éprouvantes que l'embargo subi avec son arrivée au pouvoir dans une compétition électorale irréprochable mais biaisée dès lors que la pâte islamiste a pris dans la société palestinienne. La compagnie pétrolière israélienne Dor-Alon a annoncé qu'elle arrêtait ses livraisons de carburant aux stations-service de Gaza et les camions de vivres passent au compte-gouttes. Plus rien ne passera à Gaza sauf l'eau et l'électricité, affirme Israël, qui va obtenir un nouveau quitus de la part de Washington aujourd'hui même avec la rencontre entre Bush et Olmert. Par ailleurs, depuis la prise de contrôle de Gaza par les islamistes, les points de passage entre ce territoire et l'Egypte sont également bloqués. Pendant ce temps, en Cisjordanie, Mahmoud Abbas investissait son nouveau gouvernement d'urgence d'où sont exclus les islamistes. Le cabinet compte une douzaine de membres, des experts indépendants, qui n'appartiennent ni au Fatah ni au Hamas. Il est dirigé par Salam Fayyad, un économiste indépendant, qui jouit de “la confiance” des Occidentaux. La décision de Abbas fraîchement accueillie par ses pairs arabes aura suscité la pleine adhésion des Occidentaux. Les Etats-Unis ont annoncé la levée de leur embargo. Le quartette de négociateurs pour le Proche-Orient a, pour sa part, reconnu, hier, la légitimité de la décision du président palestinien de limoger le gouvernement du Premier ministre du Hamas, Ismaïl Haniyeh. Enfin, à Tel-Aviv, le Premier ministre israélien a déclaré reconnaître ce gouvernement alors qu'il avait refusé de le faire lorsque l'exécutif était aux mains des islamistes. Israël va débloquer les 600 millions de dollars de taxes sur les produits destinés aux Palestiniens gelés durant le gouvernement Hamas et promet de lever les 500 barrages routiers établis en Cisjordanie et de restituer la centaine de colonies sauvages disséminées en Cisjordanie. Ce qui a immédiatement fait réagir Hamas qui accuse ouvertement Abbas et le Fatah de “trahison”. Alors que le Fatah a fui Gaza, en Cisjordanie la multiplication des attaques menées par les partisans du parti de Mahmoud Abbas contre les éléments du Hamas, suscite la crainte d'une flambée de violence semblable à celle qui a ravagé Gaza. Les bureaux d'associations liées au Hamas ont été saccagés et ses militants les plus en vue raflés. Israël a prévenu que, tôt ou tard, il faudra normaliser Gaza qui est devenue “une base iranienne” ! L'accusation porte même si ce n'est que de l'affabulation. Israël a appelé au renforcement de la coordination avec l'Egypte et la Jordanie, avec l'aide des Américains, pour faire tomber le régime islamiste installé à Gaza. D. Bouatta