RESUME : C'est la période des récoltes et Fatia ne s'accorde aucun répit. Même durant les heures où le soleil tape fort. Elle tient à finir avant le retour des orages. Fatia pense à sa fille Djohar à laquelle elle se consacre exclusivement… Les ennuis ont commencé pour elle le jour où elle a refusé la demande en mariage d'un bon parti, comme se plaisait à lui dire sa mère. Celle-ci, très peinée, lui aurait donné une raclée pour lui faire entendre raison mais son père Achour l'en avait empêchée. Durant près de dix ans, les problèmes qu'elle a rencontrés étaient dus à l'incompréhension de sa mère. Celle-ci refusait l'idée qu'elle puisse perdre son temps à élever la fille d'un homme qui l'a répudiée. - Tu lui rends service ainsi, lui disait-elle souvent. Lui, a refait sa vie et toi, tu sacrifies ta jeunesse pour la fille d'un moins que rien ! - Quand je t'écoute, j'ai l'impression que tu oublies que c'est aussi ma fille ! Je n'ai pas l'impression de me sacrifier, je ne fais que mon devoir de mère. Si tu me laissais en paix, ce serait mieux pour toi, pour nous ! Fatia ignorait alors qu'en prenant ainsi les devants, sa mère voulait lui éviter d'affronter ses frères. Ces derniers ne s'en prenaient jamais à elle. Il y avait des jours où elle s'accrochait avec ses belles-sœurs et ils ne s'en mêlaient pas. Elle croyait qu'ils la respectaient un peu. En fait, ce ne sera qu'après la mort de sa mère qu'elle réalisera qu'elle l'avait protégée à sa façon. Elle n'a pas eu l'occasion de faire la paix avec elle et de lui dire combien elle l'aimait. Car, à part leurs différends, elle restait sa fille et elle regrettait de ne pas avoir profité des occasions comme lors des fêtes religieuses pour lui sauter au cou et lui dire combien elle tient à elle. Son père, après un court séjour à l'hôpital, finira par la rejoindre, la laissant ainsi entre ses frères, tous mariés et tous n'avaient qu'une envie, remettre sa fille à ses grands-parents et la pousser au mariage. Mais elle n'était pas de nature à se laisser impressionner par leurs coups de colère. Elle était décidée à leur tenir tête. Elle n'abandonnerait pas sa fille Djohar. Elle était à l'école primaire et ses résultats étaient excellents. Si elle était renvoyée chez son père ou chez ses grands-parents, elle serait perturbée. Qui sait s'ils l'enverront en classe ou s'ils ne seraient pas tentés de la garder à la maison pour aider dans les corvées du quotidien. - Nous, on refuse de la nourrir, dit l'aîné de ses frères. Et de l'envoyer en classe. On a assez avec nos enfants ! - Ce ne sont pas des cahiers ou des stylos en plus qui vous ruineront, réplique Fatia. Djohar ira loin dans ses études et elle saura être reconnaissante envers ceux qui l'ont aidée ! - Non, non… Pourquoi n'irais-tu pas voir le procureur ? Son père ne t'a rien remis depuis des années, sers-toi de la justice pour obtenir gain de cause ! Pour se payer un avocat, elle n'en avait pas les moyens. Elle aurait eu des bijoux qu'elle les aurait vendus. Mais elle n'avait rien à vendre. Elle voudrait bien emprunter mais elle savait qu'on ne prêtait qu'aux riches. C'était une nuit d'été, comme celle de ce soir, il faisait chaud et il n'y avait pas un souffle dehors pour rendre l'atmosphère vivable. Ce soir-là, moralement à bout, elle s'était demandée si ce n'était pas dans son intérêt de se remarier. Elle donnerait une famille à sa fille. Elle aurait été toutes les deux à l'abri du besoin. Mais elle n'aura pas à y réfléchir longtemps. Le grand-père de Djohar avait reçu sa retraite. Il ne les avait pas oubliées, ignorant qu'il venait de régler tous ses problèmes, en les aidant financièrement. Ce soir-là, le cœur plein de reconnaissance, elle pense à l'argent qu'il a envoyé, trop vieux, pour se déplacer jusqu'à elle. Fatia souhaite que Dieu lui prêtera longue vie. Car Djohar a besoin de lui, tout comme elle a besoin d'elle pour s'épanouir et être heureuse. ADILA KATIA (À suivre)