RéSUMé : Le trabendo lui rapporte beaucoup au point où elle envisage de construire une maison. Un soir, elle réunit ses frères et leur demande un terrain. Après réflexion, tous sont d'accord, encouragés par leurs femmes qui ne veulent plus les avoir à la maison. Fatia et sa fille imaginent déjà le plan de leur future maison. -Tu penses qu'on aura assez d'argent pour la finir ? La question de Djohar arrache un sourire à sa mère. - On a toute la vie, répond celle-ci. Avec l'aide dont on va bénéficier et ce qu'on gagne, on y arrivera ! Viendra le jour où tu auras ta chambre, moi la mienne et surtout, on vivra en paix ! On sera chez nous. On ne gênera personne. Cela vaut tous les sacrifices. - Je t'aiderai comme je pourrais ! Mais Fatia ne lui demande rien d'autre que de se consacrer à ses études. Quelques mois après avoir déposé le dossier, elle obtient l'aide promise par la commune. Elle a de quoi lancer les travaux. Toute sa famille l'aide. Jeunes et vieux, tous viennent leur donner un coup de main. Des cousins maçons de profession se sont entendus pour travailler sur le chantier les jours où ils n'ont rien à faire. Fatia qui ne s'est pas attendue à cet élan de générosité et de solidarité est folle de joie. Elle ne sent pas la fatigue. Elle aussi se rend utile sur le terrain. En fin de journée, elle passe le sable au tamis. Elle souffre de son dos mais ne se plaint jamais. Comme d'habitude, elle se rend à la polyclinique pour contrôler sa glycémie. Parfois, elle s'y rend dans l'espoir de voir Keltoum. Il y a des mois depuis qu'elles ne se sont pas vues. Elle voudrait partager sa joie avec elle, persuadée que si elle et son fils le veulent vraiment, ils finiront par dépasser leur différend et eux aussi peuvent construire. L'infirmière la connaît aussi et quand elle lui demande si elle ne serait pas venue, ces jours-ci, elle lui apprend que Keltoum, son fils et sa famille résident maintenant au village même. - Tu n'es pas au courant ? Leur hameau a reçu de la visite, murmure l'infirmière. Des terroristes… Ils leur ont pris leur argent, leurs bijoux et de la nourriture. Ils leur ont donné la peur de leur vie. Ils ne sont pas près de retourner là-bas. - Tu ne sais pas si Keltoum habite loin d'ici ? - Si, je crois que c'est à la nouvelle cité, répond l'infirmière. Elle et son fils viennent à pied. Fatia hésite à se rendre chez Keltoum mais en pensant à la situation de celle-ci, elle décide de la voir. En compagnie de sa fille Fatia, elle se rend à la nouvelle cité et là, elle demande après sa famille. C'est une famille très connue et elle n'a aucune difficulté à la retrouver. Elle a conscience d'avoir agi sans prévenir ses frères et qu'ils risquent de mal prendre sa visite chez ses gens. Elle se doute bien qu'ils doivent les connaître mais comme ils n'ont aucune relation entre familles, ils ne vont pas apprécier qu'elle décide d'elle-même qui elle fréquentera. C'est Safia qui leur ouvre et son accueil est respectueux. Quand Fatia décline son identité, celle-ci sourit. Elle se rappelle avoir connu sa défunte mère. - Je suis venue voir Keltoum, lui dit-elle, en remarquant le silence de l'appartement. Serait-elle absente ? - Non, elle dort. Mais dis moi, pourquoi veux-tu la voir ? Fatia hausse l'épaule. Connaissant la relation conflictuelle qu'elles ont, elle hésite à lui dire le vrai but de sa visite. - Parce que vous êtes des gens bien et que je la connais. Il y a un moment que je ne l'ai vue. Si vous permettez que je la voie… Safia ne refuse pas. Elle la précède dans la chambre où est étendue Keltoum. La mère décide de ne pas les laisser seules. ADILA KATIA (À suivre)