Une cinquantaine de morts et le bilan est loin d'être bouclé. L'assaut, lancé hier aux aurores, contre la mosquée Rouge d'Islamabad est sanglant. Un précédent bilan faisait état d'une quarantaine d'islamistes tués. Le porte-parole de l'armée, le général de division Waheed Arshad, a déclaré au moment de l'assaut que les survivants islamistes tiraient sur les forces de sécurité depuis les minarets de la mosquée, où ils retenaient encore des centaines de femmes et d'enfants. C'est une offensive finale pour nettoyer la place, a précisé le général de division qui conduisait l'assaut. Le nombre des décès devait s'alourdir tant les combats étaient intenses. De fortes explosions et des échanges nourris de coups de feu étaient entendus dans le quartier, siège d'un immense complexe religieux, avec ses écoles attenantes pour chacun des deux sexes. Hier, de nombreuses ambulances allaient et venaient à Islamabad, sirènes hurlantes. Selon les autorités, une centaine de militants commandée par des proches d'Al-Qaïda s'était retranchée dans cette mosquée symbolique du radicalisme islamiste au Pakistan et retenait 300 à 400 étudiants, dont des femmes et des enfants, en tant que boucliers humains. Les forces de sécurité n'avaient secouru à l'assaut final que 27 femmes et 3 enfants. Musharraf a promis que l'armée ferait en sorte que ne survienne aucun dommage collatéral non nécessaire ! Le général Arshad avait dit ne disposer d'aucune information sur le sort d'Abdul Rashid Ghazi, le chef des irréductibles de l'insurrection islamiste, lequel, la veille, avait promis le lancement de la révolution islamiste sur le corps des martyrs de la mosquée Rouge. Les affrontements dans la mosquée avaient débuté le 3 juillet, dans cette banlieue arborée d'Islamabad. La mosquée Rouge était devenue malgré cela un vivier d'extrémistes liés à Al-Qaïda. Les groupes d'étudiants armés de bâtons et les étudiantes vêtues de la burqa venus manifester en solidarité avec les assiégés ont déconcerté les habitants du quartier. Mais, l'affaire de la mosquée est la conséquence directe de la campagne de moralisation lancée depuis des mois par les Islamistes avec le consentement des autorités qui ont laissé faire. Leur activisme, qui les avait conduit à brûler des piles de CD et à enlever des personnes dans des supposées maisons closes, avait pourtant suscité des craintes sur l'extension de l'extrémisme en provenance des régions tribales frontalières avec l'Afghanistan. Lorsque Musharraf s'est décidé à lancer l'assaut contre la mosquée, même ses officiers de sécurité, qui connaissaient les liens de la mosquée avec les extrémistes, ont été déconcertés par la férocité de la résistance. Selon eux, le site n'abritait pas que des seconds couteaux. Un membre du groupe extrémiste Jaish-e-Mohammed, accusé d'être lié avec la tentative d'assassinat du Premier ministre Shaukat Aziz en 2004, a été tué pendant le siège et, toujours selon la police, d'autres responsables islamistes se trouvaient dans la mosquée, notamment des membres du groupe extrémiste Hartatul-Jihad-e-Islami accusé d'être impliqué dans le meurtre du journaliste Daniel Pearl et dans une tentative d'attentat contre le président pakistanais. Ghazi a toujours nié la présence d'extrémistes, affirmant que la mosquée abritait simplement 10 000 étudiants, âgés de 10 à 25 ans, originaires de le la région des zones tribales du nord-est du Pakistan, le vivier des talibans. D. B.