La session du nouveau comité central (CC) du Front de libération nationale (FLN), tenue jeudi et vendredi à l'hôtel Riadh de Sidi Fredj, à Alger, a confirmé la maîtrise quasi-totale de la situation par M. Ali Benflis. Celui qu'on disait en difficulté a fait adopter à l'unanimité tous les textes (règlements intérieurs du parti et du CC, résolution organique, politique générale, bureau politique) soumis à l'appréciation des 259 membres présents du CC (sur un total de 265). Et l'unanimité a été accompagnée de salves répétées d'applaudissements à l'attention du secrétaire général du FLN, amplement ravi d'avoir opéré, à sa convenance, les réglages nécessaires à la propulsion escomptée du parti dans un avenir plus crédible. La trogne rubiconde des caciques veut être remplacée par de nouveaux visages innocents, soucieux, comme l'a recommandé Benflis, de bâtir une formation politique capable d'obtenir les faveurs des électeurs grâce au mérite et la compétence. Cela explique l'injection en douceur d'une bonne dose de sympathie au bureau politique, dont la composante a été expurgée des vieilles “carcasses” symboles de la triste période de l'unicité de la pensée. Le “discours politique nouveau”, les “légitimités de compétence et du mérite” et la “crédibilité” énoncées par Ali Benflis dans son discours inaugural ne sont pas encore l'apanage du FLN ; ce sont les valeurs que ce dernier cherche à acquérir dans sa quête de rupture définitive avec les étiquettes négatives qu'il a collectionnées avec arrogance durant sa période dictatoriale d'avant 1988. “Notre tâche principale est de gagner les légitimités de compétence et du mérite (…) Le temps est venu pour nous de nous constituer en lieu de production d'idées nouvelles” et d'“être une locomotive de progrès et de développement de l'Algérie …”, a déclaré Benflis. Aujourd'hui, le FLN veut agir en tant que première force politique du pays. La langue de bois de son patron, au lendemain des élections législatives d'octobre 2002 (il affirmait alors que la gestion des affaires nationales exigeait le concours de tous), semble laisser place à une détermination soudaine d'assumer le statut et les charges confiées par les Algériens à la faveur de cette échéance. “Nous devons trouver des solutions aux problèmes”, a dit Benflis. Il a d'ailleurs poussé la logique jusqu'au bout, se permettant, en effet, de désigner du doigt des détracteurs qu'il a eu à soutenir par le passé. Même s'il n'a pas cité de noms (“il n'est pas de mes habitudes d'humilier des gens”), l'allusion au chef de l'Etat est presque claire. Le FLN n'a ainsi pas “la prétention de faire le bonheur des Algériens malgré eux”, il a juste “la saine ambition de le faire avec eux et pour eux”. Il veut aussi “bannir ce réflexe qui consiste à nier les apports d'autrui et leurs réalisations pour bâtir, à nouveau, sur du néant ou presque ...” Il veut “compter sur des hommes et des femmes forts de leurs convictions”, et qui ne “succombent pas aux tentations des calculs conjoncturels”. Il rejette les “réflexes égoïstes et conjoncturels” et croit que l'“avenir appartient à ceux qui ont une vision basée sur des valeurs et sur des convictions profondes ; qui sont prêts à consentir des sacrifices pour être en paix avec leur conscience…” Ali Benflis a insisté sur le devoir, pour le FLN, de parvenir à une souveraineté de décision, à une indépendance. Indépendance vis-à-vis des militaires, indépendance vis-à-vis des diverses officines du régime : “Nous n'accepterons pas de tutelle”, a promis Ali Benflis. L. B. Présidentielle : “Seul un congrès extraordinaire…” Ali Benflis a annoncé que seul un congrès extraordinaire pourrait décider de présenter un candidat FLN ou bien soutenir une candidature externe à l'élection présidentielle de 2004. Bureau politique : six nouvelles têtes Ali Benflis a proposé et obtenu la désignation de six nouveaux membres, dont deux femmes, au sein du bureau politique. Halima Lakehal (députée), Saliha Djeffel, Abdelkader Sallat (ministre chargé de la Réforme pénitentiaire), Abdelaziz Djerrad, Mohamed Djezzar et Mohamed Khakha rejoignent l'instance exécutive du FLN dans laquelle siègent déjà des noms connus comme Karim Younès (président de l'Assemblée populaire nationale) Abderrazak Dehdouh (chef de cabinet de Benflis au gouvernement) ou Abdesslam Medjahed. Abderrahmane Belayat, un des membres influents, a été affecté à la commission des élus ; Abdelmadjid Attar (ministre des Ressources en eau) et Fatma-Zohra Bouchemla (ministre chargée de la Communauté algérienne à l'étranger) siègeront dans la commission encadrement. Gouvernement : changement après la visite en Mauritanie ? Un changement du gouvernement pourrait être effectué après la visite officielle du Chef du gouvernement ce mardi en Mauritanie. “Il ne serait pas impossible ni étonnant de changer le gouvernement après cette visite”, nous a indiqué, hier, un haut responsable du FLN. Barkat, un homme averti Le règlement intérieur du FLN, adopté au cours de cette session du CC, prévoit des sanctions pouvant aller jusqu'à l'exclusion contre tout membre coupable de “publier des communiqués sans autorisation ou de prendre des décisions contraires aux intérêts du parti ou même les contester publiquement”. Saïd Barkat sait à quoi s'en tenir. L. B.