Le procès d'appel de l'ex-wali d'Oran, Bachir Frik, a remis sur le tapis les attributions du premier responsable d'une wilaya, que le ministre de l'Intérieur, M. Zerhouni, compte renforcer encore plus. La perspective des prochaines élections locales rend encore plus d'actualité ce sujet. Ainsi, plusieurs points concernant les pouvoirs de ces “mini-présidents de la République” comme l'avait formulé le procureur général lors du procès, ont été remis en cause. Des attributs que d'aucuns estiment avoir été utilisés par la quasi majorité des walis et cela depuis la “nuit des temps” sans qu'aucun ait été gêné ou encore moins jugé. En plus d'avoir remis en cause ses prérogatives, ce procès a aussi posé la question du pouvoir d'un wali ester en justice un de ces collègues. Les trois jours de débats, parfois houleux, ont opposé le juge avec Frik et les avocats au sujet des articles du décret 93/84 où il était question des quotas de logements et de locaux commerciaux qu'un wali est autorisé à distribuer. Ainsi, l'article 10 de ce décret 93/84 autorise aux walis un quota de 10% et leur distribution à son gré. L'article 26 du même décret l'autorise aussi à attribuer directement (sans enchères publiques) les locaux commerciaux à concurrence d'un quota de 15%. L'un des chefs d'inculpation à l'encontre de Frik a été l'attribution d'un logement à Oran pour une dame originaire de Batna : “Il n'y a pas des personnes nécessiteuses à Oran, comme des enfants de chouhada ?” avait été questionné l'ex-wali qui répondait : “La loi ne m'interdisait pas cela. C'était dans mes prérogatives”, en utilisant l'argument de l'article 10 du décret 93/84. À propos de la location des locaux commerciaux, il lui a été reproché de ne pas avoir procédé à la mise aux enchères préalables et de s'être octroyé un quota de 15% alors que la loi (article 03 du décret 89/36) qui autorisait cela avait été abrogée par l'article 26 du décret 93/84, 15 mois avant sa désignation à la wilaya d'Oran. Ce à quoi Frik répondait que le décret ne le lui interdisait pas, l'autorisait même et qu'il pouvait donc s'appuyer sur l'esprit de l'ancien décret. Une “analyse” confirmée par un autre accusé, Makhloudi Chaâbane, l'ex-directeur de l'Opgi d'Oran. D'ailleurs, c'est ce vide juridique qui a été l'une des bases des plaidoiries des avocats de la défense qui insistaient aussi sur la situation générale du pays lors de ces années de “la décennie noire”. Ces chefs d'inculpation donnent aussi plus de consistance sur ceux qui s'interrogent sur le “pourquoi Frik et pas d'autres ?” et de ce fait aux affirmations de l'ex-wali et ses avocats sur la théorie du complot. Aussi, le verdict du procès d'appel qui a duré trois jours a surpris tous ceux qui l'ont suivi. Même si la peine a été allégée pour l'ex-wali, les chefs d'inculpation ont été battus en brèche sans que cela puisse, au bout, innocenter Frik et les trois autres co-accusés. Ce procès bouclé, on s'attend à ce que va advenir l'ex-wali d'El-Tarf, Djilali Arar, en détention depuis plusieurs mois en attendant d'être jugé. Salim KOUDIL