C'est jeudi qu'a eu lieu, à la salle des fêtes de Berriane, chef-lieu de daïra, 40 km au nord de Ghardaïa, la cérémonie de mariages collectifs qui a concerné pas moins de 50 heureux élus. Conformément à la tradition et en sus de la population locale, cette grandiose cérémonie a été rehaussée par la présence de notables et de dignitaires de toutes les communautés de la vallée du M'zab (ibadites et malékites), et ce, pour démontrer et raffermir davantage les liens de respect, de convivialité et de vie en bonne harmonie entre elles. Rappelons que cette coutume est née à Berriane après l'indépendance, grâce à une poignée d'étudiants algériens rentrés de Tunisie après avoir terminé leurs études à la mosquée Ezzitouna, lesquels ont introduit la première cérémonie de mariage et ont été de ce fait les précurseurs de cette forme d'organisation sociale. Cette cérémonie est le fruit d'intenses préparations qui durent depuis plusieurs semaines sous la conduite éclairée du comité des sages, communément appelé Azzaba, et dont l'apothéose a été atteinte par l'officialisation religieuse du mariage avant sa transcription à l'état civil. Des milliers de personnes ont convergé vers ce ksar de la vallée du M'zab pour assister à cette manifestation sociale séculaire. Rappelons tout de même que ce type de cérémonie intervient après l'inscription de jeunes célibataires désirant se marier selon cette tradition. La participation aux frais ne dépasserait pas les 5 000 DA par prétendant. Comme de coutume, la cérémonie a commencé par la lecture de quelques versets du Coran (particulièrement sourate El Anâam). Elle a été suivie par une allocution de bienvenue prononcée par un membre du comité des sages, à travers laquelle il a souhaité la bienvenue à tous les présents dont les invités et le notaire ramené par les Azzaba pour faire authentifier civilement les contrats de mariage conformément aux exigences religieuses et du droit positif. S'ensuivra alors le rituel d'habillage des mariés par les membres des Azzaba de Berriane ainsi que quelques autres des régions de Ghardaïa, et ce, devant une assistance uniquement masculine qui a admiré à la fin de l'opération d'habillage des jeunes hommes enveloppés dans de superbes atours traditionnels (el tatwidj) qui donneront au contraste de la salle cette espèce d'aura sur tous les mariés. Faut-il préciser que cette tradition de faire habiller tous les jeunes mariés de la même étoffe est une intelligente façon de présenter tout le monde sur le même piédestal, où n'émerge ni statut social ni autre privilège, bien que dans le lot vous trouverez de toutes les couches et de tous les niveaux. Après l'opération d'habillage, les convives se disperseront pour revenir après la prière d'el îcha afin d'assister aux festivités culturelles, qui consistent, généralement, en une pièce de théâtre et des chants religieux entonnés par une chorale locale. Par la suite, des cortèges se forment au gré des amitiés et des affinités pour déposer les mariés, chacun devant sa demeure. Hier, vendredi, les mariés se sont déplacés au cimetière de la ville pour honorer leurs morts et leur faire partager, s'il en est, leur moment de bonheur. Ce n'est que vers 1982-1983, nous dit-on, que le comité des sages de la région a avalisé cette forme de cérémonies, en les responsabilisant pour toutes les opérations jusqu'à en faire d'elles une forme de rite ancestral jalousement gardé. L. KACHEMAD