Le système national de retraite est en “détresse”, constate-t-on une fois de plus au niveau de la direction générale de la Caisse nationale de retraite (CNR). Cependant, c'est une sérieuse alerte qui a été lancée, hier, à partir de cette caisse, qui risque la “panne”, si elle continue d'accuser une courbe ascendante du déficit au fil des exercices. En effet, la CNR éprouve de sérieuses difficultés financières pour assurer le paiement régulier des pensions de retraite et a été “contrainte” de puiser dans ses réserves pour faire face à ses obligations. Autrement dit, à long terme, c'est la pérennité du système national de retraite qui est remis en cause. D'autant qu'on révèle que les réserves dont disposait la CNR, estimées en 1986 à 11,84 milliards DA (une couverture de 32 mois de pension), “sont aujourd'hui totalement épuisées”. En ce sens, la “révision” du dispositif actuel de ce système se révèle un mal nécessaire qui fera des mécontents. Et ils seront nombreux si l'on se réfère aux pistes prospectées à travers la “révision” qu'on préconise au niveau de la direction générale de la CNR. Bien sûr, il s'agit surtout de rééquilibrer le rapport actif cotisants-retraités pour tenter d'installer “l'équité intergénérationnelle”, aujourd'hui désespérément bancale. Et pour cause, la population active est estimée aujourd'hui à 3 millions de travailleurs salariés pour 180 000 retraités. Et selon les statistiques officielles, le rapport démographique passe de 2,4 actifs cotisants pour un bénéficiaire d'une pension ou d'une allocation de retraite en 1998 à 2,80 en 2005. Alors que la pérennité du système exige, selon les spécialistes, un rapport démographique de 5 actifs cotisants pour un retraité. Une situation bancale qui a donc fait que les recettes et les dépenses de la CNR ont évolué à des rythmes différents, estime-t-on au niveau de la direction générale de cette caisse. “Le manque à gagner en matière de recettes est estimé, fera-t-on remarquer, pour l'année 2005 à 1,14 milliard DA. Les recettes ont connu une croissance modérée alors que les dépenses ont évolué beaucoup plus rapidement”, explique cette même source. Dans le détail, on saura ainsi que la croissance modérée des recettes est liée notamment à la situation générale de l'emploi sous l'éclairage singulier, d'un rapport, actif cotisant-retraités qui évolue de manière prononcée en défaveur de la population active. La faiblesse du taux de cotisation, à travers son invariable “inadéquation” avec le niveau des avantages servis par le régime de retraite, ne sera pas en reste dans ce déséquilibre. Un déséquilibre alourdi considérablement par les départs précoces de la vie professionnelle de milliers de travailleurs dans le cadre du dispositif de l'ordonnance du 31 mai 1997. Ce qui n'a pas manqué de générer, affirme-t-on, une charge financière additionnelle de l'ordre de 5 milliards DA par an. Comment sortir de cette impasse ? Du côté de la CNR, on suggère “d'apporter des modifications au dispositif de retraite sans toucher aux fondements”. Par exemple “en allongeant la durée de travail”. Ce qui va assurément contribuer à ralentir l'évolution des dépenses, et à stabiliser relativement les recettes. Ou encore le relèvement du taux global de cotisation au titre de la branche retraite. Comme cela a été le cas en 2006. “Un relèvement de 16% à 17,25% (10% employeur, 6,75% salarié et 0,50% fonds des œuvres sociales) qui va permettre, dit-on, au régime général de retraite de bénéficier d'un apport additionnel de ressources estimé à près de 11 milliards DA au titre de l'année 2007”. Mais n'y a-t-il pas lieu de relever que de telles solutions, si elles résolvent un problème, elles vont, par ailleurs, en créer d'autres. Car il n'est pas évident que certaines catégories sociales supporteraient sans broncher le revers de la médaille. C'est ce qui, peut-être, explique la lenteur dans les réformes du système national de retraite. L'Etat, en effet, n'arrive toujours pas à trouver le juste temps et ce n'est pas demain la veille. Ce n'est d'ailleurs pas sans raison que le président de la République parle du Fonds national de réserves comme d'une soupape de sécurité pour le système de retraite. Rappelons que pour éponger son déficit, la CNR a fait appel au budget de l'Etat pour des avances de 6 milliards en 1996 et 14 milliards en 1998. Les solutions de facilités, ça existe. Obliger, par exemple, les travailleurs à cotiser plus. Ou encore maintenir les pensions de retraite à des niveaux insignifiants, enfonçant le troisième âge de plus en plus dans la précarité. Il ne faut pas oublier (rapport de la Banque mondiale établi en 2005) que 60% des actifs algériens ne paient pas leurs cotisations. Des membres du gouvernement reconnaissent que le problème du système de pension et celui de la Sécurité sociale sont des problèmes de recouvrement. Et si on venait dans cette même veine à parler du secteur agricole par exemple ou des non-salariés dont une grande partie échappe à l'affiliation à la Sécurité sociale. Et même d'autres secteurs d'activité ou la sous-déclaration de salaires sont devenus une règle. Ce ne sera pas une mauvaise idée, si l'on commençait par là. Zahir Benmostepha