Washington s'est rendu à l'évidence : point de sortie honorable du bourbier irakien sans la participation des Syriens et des Iraniens. Tandis que le Premier ministre irakien est à Damas, Ahmadinejad a annoncé sa visite à Bagdad. Nouri El Maliki était attendu hier à Damas pour une visite officielle. Il s'agira de décortiquer les relations, historiquement tumultueuses, entre les deux capitales. La Syrie avait été le seul allié arabe de l'Iran pendant la guerre qui a opposé ce pays à l'Irak de 1980 à 1988. Le processus de normalisation entre les deux pays a été inauguré en janvier avec le séjour à Damas du président irakien Jalal Talabani, après que les deux voisins eurent renoué des relations diplomatiques en novembre 2006. La visite de Maliki intervient dix jours après qu'il se soit rendu à Téhéran, alors que l'Iran est toujours accusé par les Etats-Unis de soutenir des groupes armés chiites qui combattent l'occupation américaine. Washington considère également que les autorités syriennes et iraniennes ne déploient pas suffisamment d'énergie pour prévenir les infiltrations de combattants étrangers en Irak. Cependant, un groupe américain d'études sur l'Irak coprésidé par l'ancien secrétaire d'Etat James Baker avait recommandé, en décembre 2006, à l'administration Bush, d'entamer des discussions directes avec l'Iran et la Syrie sur l'Irak et sur d'autres questions régionales. Le Premier ministre irakien doit évoquer avec ses hôtes syriens la situation des réfugiés irakiens en Syrie, dont le nombre a atteint plus d'un million, et qui constituent pour Damas un fardeau économique, social et politique. Depuis l'invasion de l'Irak par les troupes américaines, en mars 2003, environ 2,3 millions d'Irakiens se sont réfugiés principalement en Syrie. Le HCR estime que, chaque mois, 30 000 Irakiens s'installent en Syrie. Damas se dit disposé à apporter sa collaboration dès lors que les Irakiens trouveront la voie de la réconciliation globale établissant un calendrier pour le départ des forces américaines d'Irak. Lors de sa visite en Iran, le guide suprême iranien, Ali Khamenei, avait également déclaré à El Maliki que le départ des occupants favoriserait un règlement des problèmes du pays. À l'issue d'une conférence sur la sécurité en Irak, organisée les 8 et 9 août à Damas, les voisins de l'Irak, dont l'Iran, ont dénoncé les actes de violence et de terrorisme visant les civils et les infrastructures en Irak et se sont engagés à coopérer avec Bagdad pour une amélioration de la sécurité. D'autre part, le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, prévoit une visite en Irak, qui serait la première de ce type. En revanche, le président irakien a, lui, fréquemment visité l'Iran ces dernières années, le plus récemment en juin dernier. L'Iran et l'Irak étaient devenus des ennemis jurés après la guerre engagée par Bagdad qui dura de 1980 à 1988 et fit environ un million de morts. Leurs liens se sont rétablis après la chute de Saddam, grâce à la forte présence de responsables chiites dans les gouvernements et au parlement irakiens. Une influence vivement critiquée par les Etats-Unis qui accusent régulièrement Téhéran de soutenir des groupes extrémistes chiites, ce que la République islamique a toujours démenti. Bush devait publiquement contredire Maliki quand celui-ci a jugé, lors de sa dernière visite à Téhéran, que l'Iran jouait un rôle constructif en Irak. Dans le même temps, la France tente de se replacer en Irak où a séjourné Kouchner, ministre des Affaires étrangères. C'est la première visite d'un responsable français de ce rang depuis l'invasion américaine de mars 2003, elle intervient alors que Sarkozy et Bush venaient d'afficher leur rapprochement à l'occasion des vacances du président français aux Etats Unis. D. Bouatta