Bouteflika a eu une réponse sibylline à la question du journaliste de l'agence de presse italienne qui lui demandait s'il allait rempiler pour un troisième quinquennat. “Pour le reste de votre question, vous voulez m'entraîner dans des spéculations sans intérêt véritable. Je ne m'y prêterai donc pas…” On peut comprendre que le Président refuse de se prêter à un débat qu'il juge prématuré sur l'éventualité d'un troisième mandat, si le Président s'en était tenu à contester la pertinence de la question. Mais, il prend soin de souligner, à la suite de cette réponse, son “attachement au respect, en toutes circonstances, de la souveraineté du peuple algérien et des modalités démocratiques par laquelle celle-ci doit s'exprimer”. En prenant soin de préciser que la forme que prendrait cet éventuel renouvellement de mandat était nécessairement “démocratique”, le Président confirme la réalité de l'option d'un troisième mandat. Il y a une semaine, le Chef du gouvernement, interrogé par la Radio nationale, a dit exactement la même chose : “Le peuple peut choisir librement ses responsables, y compris le président de la République.” Précision de taille quand on sait que dans cet entretien, Belkhadem était en train de soutenir le projet, récurrent, d'une révision constitutionnelle. Quand, dans la même émission radiophonique, le chef du FLN précise, d'une part, que “la non-limitation des mandats présidentiels est une question très importante” et qu'il est “pour un troisième mandat pour le président de la République s'il le souhaite”, on comprend, mais pourquoi la question de la révision de la Constitution, un moment enterrée, est à nouveau à l'ordre du jour ? L'idée de révision constitutionnelle fut, un temps, mise sous le boisseau et le projet de troisième mandat remis en cause, les deux étant liés, en effet. Il apparaît, aujourd'hui, que la Constitution devait être retouchée dans l'option d'un troisième mandat et d'une plus grande emprise présidentielle sur l'Exécutif. L'hésitation avait-elle rapport à l'état de santé du Président ou à une évolution du contexte politique ? Il est peu probable que les changements constitutionnels à nouveau désirés soient annoncés avant les élections locales du 29 novembre. Et le Président n'exprimera probablement son intention qu'au dernier moment, quand la nature des amendements constitutionnels aura elle-même révélé sa véritable finalité. Une question se pose, cependant, dès à présent, la campagne pour la révision de la Constitution rencontrera-t-elle les conditions de consensus que les différents plébiscites électoraux et référendaires organisés depuis 1999 ont connues jusqu'ici ? La paix n'est pas “revenue”, les scandales financiers et fonciers se sont multipliés, l'administration et la justice n'ont pas connu les progrès escomptés, le million de logements ne sera sûrement pas au rendez-vous de 2009, le million d'emplois encore moins et l'attelage de l'alliance politique tire à hue et à dia. C'est quelque peu paradoxal que ce moment-ci soit choisi pour relancer le thème du troisième mandat. Ni sur le bilan économique et social, ni l'enthousiasme populaire, ni la qualité des soutiens politiques ne justifient une prolongation pour le régime. M. H. [email protected]