Crise institutionnelle au Liban : le président libanais, Emile Lahoud, a quitté le palais présidentiel à la fin de son mandat, vendredi à minuit, sans remplaçant après que le Parlement a à nouveau échoué à élire son successeur. Avant son départ, Lahoud a confié à l'armée la sécurité du pays, une initiative immédiatement rejetée comme inconstitutionnelle par le gouvernement du Premier ministre Fouad Siniora. Avant de remettre les clefs de Baabda où il a vécu sept années, après avoir prorogé son mandat de trois années supplémentaires, l'ex-président s'est contenté de déclarer que le gouvernement de Siniora est illégal et inconstitutionnel, quoique l'Amérique et la France et d'autres disent, remuant le couteau dans la plaie. Le gouvernement, amputé de six ministres de l'opposition depuis six mois, a assuré qu'il continuerait d'assumer ses responsabilités et d'exercer toutes ses prérogatives après le départ du président. En vertu de la Constitution, les prérogatives du chef de l'Etat sont automatiquement transmises au gouvernement en cas de vacance de la présidence. Le jour du départ de Lahoud, la séance parlementaire consacrée à l'élection d'un nouveau chef de l'Etat a été reportée pour la cinquième fois en deux mois, faute d'un accord entre la majorité parlementaire anti-syrienne et pro-occidental et l'opposition accusée par cette dernière d'être soutenue par Damas et Téhéran. Une nouvelle séance a été fixée au vendredi 30 novembre. La population libanaise, dans sa diversité communautaire, reste persuadée qu'une solution sera trouvée in extremis dès lors qu'elle refuse tout remake de la guerre civile des années 1980. Il reste que le report de l'élection présidentielle aggrave les incertitudes sur l'avenir politique du pays et les inquiétudes sur une dégradation de la sécurité. De multiples interventions internationales, de la France en particulier, mais aussi de l'ONU et la Ligue arabe, pour débloquer la situation, sont restées vaines. La majorité parlementaire anti-syrienne accuse l'opposition de vouloir un président inféodé à la Syrie et à l'Iran. Le camp prosyrien est de son côté convaincu que le pouvoir veut choisir un chef de l'Etat soumis aux Américains. En raison de la haute tension politique, les mesures de sécurité ont été renforcées, notamment à Beyrouth et ses environs. Blindés, soldats et membres des forces de sécurité intérieure étaient postés aux principaux axes de la capitale. Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, a regretté le nouveau report de l'élection présidentielle, exhortant les parties à maintenir le calme et à s'efforcer de trouver un compromis. Le département d'Etat américain a lui aussi appelé toutes les parties libanaises à faire leur possible pour maintenir le calme et assurer la sécurité des Libanais. L'Union européenne a appelé les partis politiques libanais à continuer le dialogue. La France, dont le ministre des AE a, pour ainsi dire, élu domicile à Beyrouth, a dit qu'elle continuait à espérer un accord. D. B.