Le vice-président du Forum des chefs d'entreprise constate la persistance de freins à l'investissement. “Le secteur privé considère qu'il existe toujours des freins à l'investissement, à la croissance et à la relance économique”, affirme Rédha Hamiani, vice-président du Forum des chefs d'entreprise et patron de Redman, hier, lors du forum organisé par le quotidien El Moudjahid. L'orateur soutient que les grands handicaps de l'économie algérienne (chômage, croissance molle…) “sont les mêmes depuis dix années”, en dépit de l'existence des ressources financières importantes, qui permettent de mettre en œuvre une politique vigoureuse en matière d'investissement. Le paradoxe de l'économie algérienne réside aussi dans le poids du secteur pétrolier, 30% du produit national brut (PIB), plus de 60% des recettes fiscales, mais seulement 3% de la population active. Le vice-président du Forum des chefs d'entreprise reconnaît que l'environnement entrepreneurial s'est amélioré, mais qu'en parallèle, on a laissé un secteur informel se développer. Ce secteur, qui “aurait pu être intégré intelligemment au départ”, représente aujourd'hui 40% de la richesse nationale. Il constitue de ce fait une menace sur l'économie. “La facture a disparu, le registre du commerce, qui atteste la fonction de quelqu'un qui se met dans le commerce, est un registre d'emprunt, le chèque a disparu ; toutes ces pratiques commerciales font que nous sommes sous un empire qui se dégrade de jour en jour. On est victimes dans le monde commercial de toutes sortes de tromperie, il faut faire gaffe à tout : on scanne les chèques de banque, on scanne les lettres de crédit, vous êtes confrontés à un environnement de plus en plus interlope, de plus en plus bizarre, et vous devez faire attention à tout cela”, dira Hamiani. Le secteur informel dans notre pays a tissé des relations de solidarité avec des centres de décision et les conditions d'apparition du secteur informel dérivent directement du mode de fonctionnement de notre système. “Le secteur informel est identifié : on a maintenant une idée plus précise du nombre d'acteurs, du nombre d'intervenants, des wilayas où ils sont. On parle de 70 zones de non-droit, peut-être plus. Mais aucune autorité n'exerce le moindre contrôle sur les acteurs activant dans ce secteur”, souligne le conférencier. Le vice-président du Forum des chefs d'entreprise précise que le secteur informel est un facteur aggravant la corruption et que plusieurs centres de décision sont concernés par le phénomène. En outre, le secteur informel fausse la concurrence, la compétitivité et les structures des prix. Et dans ces conditions, aucun investisseur, aussi bien national qu'étranger, ne pourrait prendre le risque. C'est que les règles du jeu économique ne sont pas respectées. Du coup, le risque économique est démesuré. Rédha Hamiani affirme que le Forum des chefs d'entreprise est favorable à l'ouverture, à l'instauration d'une véritable économie de marché. Pour lui, c'est une opportunité, mais aussi une source d'inquiétude. Une opportunité, car l'adhésion à l'OMC et l'entrée en vigueur des accord d'association avec l'Union européenne permettront la récupération d'une logique commerciale et de fonctionnement qui fait défaut actuellement. Cette ouverture est vécue aussi par les opérateurs économiques comme une source d'inquiétude, car ils ne sont pas encore préparés à la concurrence. C'est que les entreprises viennent à peine de sortir de la gestion centralisée, qui a duré plus de 30 années. D'où la nécessité de mettre en œuvre un programme de mise à niveau. Malheureusement, comme le constate le patron de Redman, ce programme, tel qu'il est engagé, pose problème. Le rythme est, selon lui, long. Alors que l'ouverture de notre économie se fait rapidement. Par ailleurs, pour Hamiani, la mise à niveau doit être sélective et devra concerner les entreprises qui exportent et celles qui bénéficient d'atouts spécifiques et concurrentiels. Le vice-président du Forum des chefs d'entreprise regrette l'absence de politique industrielle, de projet de société. Il regrette, par ailleurs, la levée de boucliers concernant l'article de la loi de finances portant importation et revente en l'état. En tout état de cause, le Forum des chefs d'entreprise milite pour le maintien de cette disposition. M. R.