Annoncées en grande pompe au début de cette décennie comme étant le remède aux rentes, et donc à l'immobilisme économique et à la destruction de valeur, la privatisation et/ou ouverture de capital des entreprises publiques présentent un bilan très mitigé, alors que la concurrence s'installe et dirige habilement les décisions économiques. On attendait Air Algérie, Algérie Télécom, les cimenteries, la Cnan, le CPA, les hôtels et Saidal, et on a eu droit à rien de tout cela. Par contre, on voit tous les jours un peu plus les concurrents directs de ces compagnies qui accaparent une part de marché un peu plus importante et installent ainsi des barrières à l'émergence de nouveaux entrants locaux ou internationaux : Air France/Aigle Azur dans le transport aérien, CMA-CGM / GoFast dans le transport maritime, Orascom et Wataniya sur la téléphonie, Lafarge sur les cimenteries, Accor sur les hôtels, BNP et Société Générale sur les banques. On ne peut pas attendre que ces groupes privés agissent commercialement pour “protéger” les entreprises publiques concurrentes. Au contraire, c'est de bonne guerre que ces groupes utilisent tous les moyens du bord pour s'installer durablement et minimiser toute concurrence. Ainsi, ne pas doter les grands groupes publics de compétences managériales et de moyens capables de faire face à cette concurrence, c'est les condamner à une mort lente et c'est surtout alimenter tous les facteurs nécessaires à l'émergence de nouveaux monopoles privés qui dicteront leur loi et leurs prix. Certes, il est difficile pour le régulateur/organisateur du marché qu'est l'Etat de combiner privatisation et attrait de nouveaux investisseurs dans un même secteur d'activités car il est nécessaire de permettre à ces investisseurs d'assurer un retour sur un investissement acceptable, mais, et après dix années, il est temps de permettre à nos entreprises publiques de se défendre et d'être à leur tour agressives sur le marché intérieur. Il n'est point question de s'attaquer au reste du monde, d'exporter, mais seulement assurer un service économique, pratique et une bonne gestion des ressources et maintenir ainsi la valeur des actifs de l'Etat. Les seules entreprises privatisées à ce jour sont celles qui ne “dérangeaient” personne dans l'économie nationale : les entreprises de céramique, les dépôts/ventes de matériel, l'entreprise de gaz industriel, les briqueteries, les câbleries, les foncières intéressantes, les entreprises nécessitant toujours une présence de l'Etat actionnaire (les ferroviaires). Le MPPI est devenu le MIPI : on ne parle plus de privatisation, mais on s'avance vers une structuration des organismes de décision, c'est parfait. Le MIPI va dégraisser les SGP ; on arrive vers une organisation plus souple, plus flexible, plus réactive, c'est extraordinaire, mais on attend toujours un organe de planification, un ministère de l'Economie peut être intégré dans le ministère des Finances qui gérerait ces actifs de l'Etat directement et déciderait ainsi plus vite. Aujourd'hui, on attend que la privatisation du CPA réussisse dans les termes déjà définis et que l'ouverture du capital à hauteur de 30 à 35% des autres groupes que sont Air Algérie, Algérie Télécom et la BDL débute au plus tôt. Le constat est clair : il faut un partenaire stratégique étranger pour gérer ces entreprises comme n'importe quelle entreprise avec des objectifs de rentabilité clair, et non la servitude d'intérêts particuliers. Cette étape d'ouverture du capital de ces groupes est fondamentale pour l'économie algérienne et, n'ayons pas peur des mots, pour la société algérienne. C'est peut-être pour cela que le temps paraÎt très long. Il n'y a aucune crainte, le cadre légal de la privatisation protège les travailleurs de ces entreprises pour au moins cinq années, et il ne faut pas avoir peur du marché, un élément de valeur sera toujours performant ; il n'y a que les médiocres et les bras cassés qui auront raison d'avoir peur. Safou Djamel