Le sommet de l'Union africaine s'est terminé à Addis-Abeba, comme d'habitude, sur une note d'optimisme chez ses participants ! Pourtant, les dossiers brûlants n'ont pas manqué, dont la guerre civile qui s'installe au Kenya, ce pays clef de l'Afrique de l'Est. La question du remplacement du commissaire de l'Union a accaparé l'attention des chefs d'Etat. Alors que le conseil des ministres des Affaires étrangères avait clôturé la liste à la succession de Konaré à trois candidats, Abdulai Osman Conteh de la Sierra Leone, Imonge Mbikusita Lewanika de la Zambie et Jean Ping du Gabon, Kadhafi a introduit la candidature de son ancien ministre des Affaires étrangères, Ali Triki, improvisant en marge du sommet un mini-sommet auquel ont pris part des Etats du Sahel. Le leader de la révolution libyenne a voulu apporter son grain de sable dès lors que ses pairs avaient choisi de reporter à une date ultérieure l'examen du futur gouvernement de l'Union, son dada et l'objectif pour lequel il met de sa poche sans compter. Il s'est avéré que certaines délégations étaient venues à Addis-Abeba surtout pour suppléer au départ du Malien à la tête de l'UA ! Les Africains restent sur leur faim : les brasiers qui embrasent leur continent demeurent vifs et sans perspectives. Pour rester dans l'exemple préoccupant au plus haut point du Kenya, la maison africaine n'a engagé aucun acte concret en rapport avec la situation alarmante prévalant dans ce pays, hier exemplaire pour sa stabilité. Et, pourtant tous les acteurs du différend kenyan se trouvaient dans la capitale éthiopienne : le président Kibaki et son opposant Odinga. Là aussi l'UA s'est fait coiffer au poteau par l'ONU. Ban Ki-moon, son secrétaire général a pris le chemin de Nairobi après avoir assisté à l'ouverture du sommet, et il a réussi apparemment à relancer la médiation de Kofi Annan, son prédécesseur au perchoir de l'ONU. Le Tanzanien Jakaye Kikwete, nouveau président en exercice de l'Union africaine, n'a pas sacrifié à la tradition promettant de faire avancer le continent, sa présence à Nairobi aura été plus qu'un symbole de la détermination de l'Organisation panafricaine à régler ses problèmes. Enfin, les chefs d'Etat africains ne sont pas à leur première défection. Pour le Darfour, n'ont-ils pas abdiqué en faveur de l'ONU et de l'UE ? Pour la presse kenyane, les premiers dirigeants du continent “n'ont pas osé s'assumer face aux attentes des peuples qui n'hésitent plus à se jeter dans les rues”. Malgré ces urgences, le sommet a ronronné sur l'industrialisation, un sujet certes d'importance mais pas prioritaire face aux démons du tribalisme qui resurgissent sur le continent et la crise financière mondiale qui souffle et contre laquelle l'Afrique n'est pas du tout outillée. L'Afrique se trouve à un tournant des plus risqués, parce que bien des décisions de ses sommets n'ont jamais été mises en application. Pourtant, lorsque fut créé en 1999, à Syrte, en Libye, l'Union africaine, il avait été annoncé qu'elle se dotera de tous les moyens de coercition pour ne plus être “le syndicat” des chefs d'Etat africains qu'avait été l'OUA. Pour plus d'efficacité, l'UA a même installé, en grande pompe, son Comité des sages, après la Conférence de l'Union, le Conseil exécutif, le Parlement panafricain, la Commission, le Comité des représentants permanents, les Comités techniques spécialisés, le Conseil économique, social et culturel et les institutions financières. “Le continent africain se signale par un essoufflement des processus démocratiques”, a conclu l'ONG. D. Bouatta