Les hydrocarbures rapportent aujourd'hui au pays, en un an, autant de recettes en devises qu'en quatre ou cinq ans au cours de la décennie 1990. L'Algérie célèbre aujourd'hui l'anniversaire de la nationalisation des hydrocarbures. Une date repère : le 24 février 1971, l'Algérie décidait de nationaliser les intérêts français pétroliers après un processus entamé en 1967 de récupération de ses richesses à travers la reprise des intérêts des multinationales BP, Esso, Shell, Mobil. Elle détenait en 1971 après cette décision historique au moins 51% des intérêts des sociétés concessionnaires françaises : CFPA, Petropar, SNPA, Coparex, Omnirex, Eurafrep, Frabcarep. Elle nationalisait également tous les intérêts miniers portant sur les gisements de gaz naturel ainsi que tous les intérêts détenus dans les sociétés de transport d'hydrocarbures. Ce n'est finalement qu'en 1981 que l'Algérie allait récupérer la quasi-totalité des intérêts pétroliers étrangers. Quelques années plus tard, la loi de 86 amendée en 1991 allait ouvrir paradoxalement le marché algérien des hydrocarbures aux compagnies étrangères. Dans les années 1990, on assiste ainsi à un rush des compagnies américaines et dans une moindre mesure de groupes européens. Aujourd'hui, les multinationales BP, Total, Shell, sont présentes en Algérie. Une génération après cette date historique, quel bilan tirer de cette entreprise de récupération de ces ressources nationales ? En ce sens, il convient de corriger deux clichés. Primo : l'ouverture du marché algérien aux compagnies étrangères n'a pas entraîné une perte de souveraineté sur les richesses nationales. Loin s'en faut. L'Algérie contrôle aujourd'hui la quasi-totalité de ses ressources. En 2006, sur une production de 229,8 millions de TEP, seulement 12,1 millions de TEP, revenaient aux partenaires étrangers. Sur une recette de 53,6 milliards de dollars, seulement 5,29 milliards de dollars correspondaient aux profits des compagnies étrangères. Autrement dit, la part des partenaires étrangers représente 10 à 12% des recettes de Sonatrach tirées des exportations de gaz et de pétrole. En 2007, sur une recette de 57 milliards de dollars, la même proportion a été transférée aux partenaires étrangers. C'est que les amendements de 2006 à la nouvelle loi sur les hydrocarbures ont fini par freiner la tendance à une augmentation des rapatriements des compagnies étrangères à travers l'institutionnelle taxe sur les superprofits des firmes étrangères. Avec ces changements institutionnels, l'Algérie aura consolidé son contrôle sur les ressources hydrocarbures, en maintenant la position dominante de Sonatrach sur le domaine minier national. La part des partenaires étrangers : 10 à 12% des recettes en devises Secundo : l'intérêt des compagnies étrangères, et notamment américaines pour le domaine minier national, n'a pas diminué. Les américaines présentes gagnent en dépit de la taxe sur les superprofits relativement beaucoup d'argent. Indice : les compagnies US Exxon Mobil, AnadarKo, notamment ont manifesté leur intérêt pour l'appel d'offres qui sera lancé par Alnaft prochainement pour l'exploration de quinze blocs. Paradoxalement, le partenariat avec les compagnies étrangères aura permis de financer les investissements massifs des années 1990 et de réaliser des transferts de savoir-faire sans lesquels les réserves d'hydrocarbures du pays seraient aujourd'hui beaucoup moindres. Fruit de ce partenariat, une génération après les nationalisations, les réserves de pétrole sont presque équivalentes à celles de 71 : 11 milliards de barils. Le potentiel de découvertes est estimé à 40 milliards de barils. En dépit des amendements, les sociétés américaines en force Au cours des cinq prochaines années, l'augmentation de la production de pétrole sera tirée en particulier par des projets en partenariat. Le plus grand projet pétrolier est celui en partenariat entre Sonatrach et l'américaine Anadorko appelé El-Merk, dans le bassin de Berkine. Sa capacité de production est de 108 000 barils/jour de pétrole. Sur les 62 milliards de mètres cubes de gaz exportés actuellement, plus de 20% proviennent des champs d'In-Salah et d'In-Amenas exploités en partenariat avec la britannique BP. Ce partenariat fait donc augmenter les recettes en devises du pays à travers des investissements nouveaux et l'introduction de technologies nouvelles. La contrepartie est un transfert de devises qui ne correspond qu'à une part modeste au regard des entrées en devises qu'engrange le pays. Comme résultats moins visibles de cette récupération des ressources : le contrôle des richesses a permis de former les cadres et de se procurer les financements pour constituer un outil industriel et une infrastructure qui confère aujourd'hui à Sonatrach sa place de première compagnie en Afrique et en Méditerranée. Ces acquis lui ont permis de se redéployer à l'international à travers notamment l'acquisition de périmètres d'exploration d'hydrocarbures au Mali, au Niger, en Mauritanie, en Libye, en Tunisie et en Egypte et l'entrée dans le capital de la compagnie portugaise EDP. Cette assise permet également de diversifier le portefeuille de Sonatrach. En effet, la compagnie pétrolière nationale est présente dans des projets de génération d'électricité, de dessalement d'eau de mer, de production d'aluminium de développement de gisements d'or, de fer, de cuivre… Au tableau gris de cette grande entreprise de récupération des richesses nationales, près d'une génération après la dépendance technologique dans le secteur reste forte, la capitalisation des connaissances aléatoires, des pertes importantes enregistrées en termes de capital humain et surtout des retombées moins visibles de ces richesses sur l'amélioration des revenus de la grande majorité de la population N. Ryad