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Le foncier caractérisé par les transactions occultes et l'abandon des terres Les conclusions d'un groupe d'experts sur les entraves au développement du secteur agricole
“Les transactions occultes, l'abandon général des terres par excès d'émiettement, le rôle limité du cadastre et de la conservation foncière, la faiblesse de l'administration du secteur de l'agriculture, autant de facteurs qui compromettent toute prise en charge efficace du développement agricole et la volonté de vouloir l'organiser et l'encadrer”. Telle est la situation du foncier agricole décrite par un groupe de réflexion, dénommé “Filaha Innove” et composé d'experts et d'anciens cadres du secteur de l'agriculture. Pour ces spécialistes, l'état du foncier agricole est complexe et se traduit sur le terrain par une diversité de statuts juridiques. Il a subi plusieurs restructurations durant son histoire. Toute cette panoplie d'instruments juridiques promulgués de 1962 à 1997 tels, entre autres, les décrets exécutifs encadrant les politiques de l'autogestion, la révolution agraire, l'accession à la propriété foncière agricole par la mise en valeur, la réorganisation du secteur agricole public et la loi d'orientation foncière reflètent l'ampleur des contradictions, des confusions, voire des changements de cap. Ceux-ci “ont eu pour effets combinés de faire assumer par l'exploitant agricole des contraintes inutiles et paralysantes”, soulignent-ils. Ce qui témoigne, ajoutent-ils, d'une absence de vision rationnelle et cohérente quant à la prise en charge du secteur de l'agriculture et du monde rural. Le groupe Filaha Innove constate, en outre, l'ampleur des travaux cadastraux pour couvrir 1 541 communes rurales et urbaines, une superficie de 11 millions d'ha en zone rurale et 400 000 ha en zone urbaine. Cette tâche “nécessitera selon l'estimation des services concernés, une période de 15 années pour l'établissement de quelque 30 000 plans cadastraux”, relève-t-il. L'objectif est de parvenir, avouent ces professionnels, à la mise en place d'une banque de données foncières qui renfermerait des informations techniques et juridiques du parcellaire dans chaque commune. Ce sont là autant de questions soulevées par cette équipe et qui seront débattues au cours de la première journée Filaha Innove, consacrée à la problématique du foncier agricole. Ayant pour thème “Foncier agricole : un atout pour le développement de l'agriculture”, cette rencontre se déroulera le 31 mars à la salle des conférences de l'agence Algex. “Il faut 15 ans pour établir quelque 30 000 plans cadastraux” Les différentes communications réservées seront animées par d'éminents experts. Le choix du thème n'est donc pas fortuit. “Un projet de loi s'y rapportant se trouve actuellement soumis à l'examen de l'Assemblée populaire nationale. Ce forum se veut ainsi la poursuite d'une réflexion déjà engagée et celle d'un approfondissement d'un thème aussi sensible que complexe”, affirment les membres de ce groupe. Le foncier agricole est également indissociable de l'aménagement du territoire et même de l'environnement tant il en constitue une dimension majeure. Pour eux, le compromis projeté dans la loi 87-19 entre un mode d'exploitation collective des terres et une appropriation individuelle des moyens de production n'a, à l'évidence, pas résisté à l'aspiration de l'attributaire à travailler pour son propre compte. Ce qui a conduit à un partage informel, mais réel des terres des EAC (exploitation agricole collective) et au non-respect par les bénéficiaires des obligations mises à leur charge par la loi, du fait de l'absence de contrôle des pouvoirs publics. Conséquence : une déconnexion du paysan vis-à-vis de la terre qu'il ne perçoit plus comme étant la sienne. Il ne fournit aucun effort pour la valoriser et la protéger. À cela, il y a lieu d'ajouter, relèvent ces experts, un désintérêt des pouvoirs publics que traduit l'absence d'actions de valorisation sur le long terme du promoteur de l'exploitant ou du propriétaire. Badreddine KHRIS